« Déportabilité » et mise au travail précaire

Alors qu’a été adoptée l’infâme loi Darmanin, amputée de certains de ses articles les plus abjects, mais pas la totalité, le texte qui suit revient sur le débat concernant « l’admission exceptionnelle au séjour » pour les travailleurs et travailleuses sans titre de séjour mais exerçant néanmoins une activité salariée dans un métier dit « en tension » [1]. Car l’enjeu est de taille : il n’y a en fait rien de hasardeux dans le fait que ce soit précisément dans ces secteurs dont les représentants se plaignent régulièrement de « pénuries de main-d’œuvre » – à savoir – agriculture, BTP, nettoyage, restauration, travail à domicile, etc – que trouvent à s’employer massivement les travailleurs et travailleuses étrangèr·es. Au point qu’on peut se demander si le qualificatif de « métier en tension » n’est pas tout bonnement une périphrase commode pour désigner les métiers où seules les contraintes matérielles pesant sur les travailleurs et travailleuses migrant·es rendent acceptables les conditions de travail et de salaire qui y ont cours. Travailleurs et travailleuses « sans-papiers », « temporaires » ou « détaché·es » : le recours à la main-d’œuvre étrangère s’avère en effet indispensable dans bien des secteurs des économies capitalistes avancées. Dans un ouvrage intitulé Le travail migrant. L’autre délocalisation, qui vient de paraître aux éditions La Dispute, le sociologue Daniel Veron montre comment ce recours au « travail migrant » se fait au travers d’une variété de statuts, légaux ou non, qui permettent la mise au travail des personnes migrantes dans des conditions moins favorables et plus intensives que celles qui ont cours sur les différents marchés du travail. À chaque fois, l’avantage comparatif repose sur la production d’un différentiel de prix, c’est-à-dire sur l’exploitation d’un infra-droit en matière de droit du…

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Auteur: Daniel Veron