« Depuis de nombreux scrutins, on crée des majorités fictives, et cela cache une grosse instabilité »

Basta! : Le nombre de votes blancs et nuls ne semble pas avoir dérogé à la règle pour un premier tour de l’élection présidentielle : 2,17 % des votants y ont recouru. Un second tour avec l’extrême droite en lice, pour la troisième fois sous notre République, se traduira-t-il par une explosion des bulletins blancs et nuls ?

Jérémie Moualek : Sur le premier tour, c’est un score classique pour les votes blancs et nuls, même si on peut quand même noter qu’il y a plus de blancs et nuls que de voix exprimés pour la candidate du PS. Au second tour, je pense qu’il y aura davantage de votes blancs et nuls, et davantage d’abstention, comparé à 2017 (4 millions de bulletins blancs et nuls et 12 millions d’abstentionnistes, ndlr). De plus en plus de personnes ne feront pas « barrage ».

Jérémie Moualek

Enseignant-chercheur à l’université d’Évry, Jérémie Moualek étudie les comportements électoraux. Il a réalisé son travail de thèse sur les votes blancs et nuls. Pendant la période d’élection, il partage chaque jour un bulletin sur son compte Twitter et sur son blog.

Les électeurs ne se contentent plus de voter à contre-opinion ou par défaut. Dans cette élection, on est en plus face à un phénomène particulier : ceux qui feront barrage au second tour le feront peut-être pour la seconde fois dans une même élection, puisqu’une partie de ceux qui ont voté Mélenchon le faisaient déjà pour cela. Demander à ces électeurs de faire deux fois barrage, c’est quand même très compliqué.

En 2017, le nombre de votes blancs et nuls bat tous les records au second tour entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen. Près de 12 % des enveloppes mises dans l’urne ne désignent aucun des candidats. Est-on face à une tendance régulière ?

On observe une tendance à la hausse des votes blancs et nuls. Cette augmentation date des années 1990, et se remarque surtout lors des seconds tours. En 1995 déjà, Jacques Chirac n’a pas la majorité des votes face à Jospin à la présidentielle. Le blanc et le nul sont suffisamment forts. Même le scrutin de 2007 a été une sorte de parenthèse enchantée concernant l’abstention et les votes blancs et nuls, ça n’a pas duré longtemps. En 2012, si on compte les votes blancs et nuls du second tour, François Hollande n’a pas la majorité des votants, il est à 48,6%.

Bulletin issu du 1er tour de la présidentielle 2012 – Archives départementales de l’Oise

Jérémie Moualek

Il est très intéressant de voir la…

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Auteur: Emma Bougerol