Depuis la Palestine, regarder l'époque en face

Le Musée, Bashar Murkus, 2021 © Christophe Raynaud de Lage / Festival d’Avignon

Dans l’alcôve de la chapelle des Pénitents Blancs, deux hommes en cage. Il y a sept ans, le premier a exécuté froidement dans un musée, au fusil mitrailleur, quarante-neuf enfants et leur enseignante. Il attend son exécution par injection létale. Le second, l’enquêteur qui l’a interrogé, a répondu après hésitation à son étrange demande de partager son dernier repas. Aucun lieu, ville, pays n’est nommé. Ce serait même, pour Bashar Murkus, un contre-sens de ramener cette fiction politique au conflit israélo-palestinien. Nourri de la réflexion de Hannah Arendt sur « la banalité du mal », l’auteur et metteur en scène a voulu explorer la notion de terrorisme et de radicalité. Interroger le point de bascule dans la violence et les conditions de son passage à l’acte pour un individu, la légitimité du monopole de la loi et de l’autorité par l’État. Les rapports de force et de domination qui se mettent en place entre les deux hommes, et dont le public est témoin au sens premier du terme, va être tout l’enjeu du questionnement philosophique et politique du Musée.

Le Musée, Bashar Murkus, 2021 © Christophe Raynaud de Lage / Festival d’Avignon

Le prisonnier cherche à provoquer l’enquêteur comme s’il voulait le pousser à se déchaîner contre lui, reconfigurant ainsi le scénario annoncé de sa mort dans un geste libre qui deviendrait un geste artistique. Pour l’enquêteur, la loi dit que quoiqu’il ait fait, il ne peut être exécuté sans jugement, et que « même quelqu’un comme lui » a des droits comme celui de choisir avec qui il prend son dernier repas. L’un et l’autre sont à deux pôles d’affrontement irréductibles. Il n’y aura pas de pitié, pas d’empathie, pas de retournement de situation, ni pour les protagonistes ni pour le public qui assiste comme lors d’une dissection à ce corps-à-corps dialectique et physique. Les hauts murs de la chapelle donnent une sorte de sacralité à cette cérémonie d’avant exécution magistralement orchestrée par la scénographie de Majdala Khoury qui, par la présence d’une caméra amène celle d’un troisième œil.

Le dispositif vidéo, dans une composition parfaitement équilibrée, renvoie l’envers et l’endroit de l’image des acteurs créant des situations nouvelles comme en quatre dimensions. Parfois un élément de rupture — lorsque les comédiens mettent des masques de mouton…

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Auteur: Marina Da Silva