Derrière le boom de l’apprentissage, une formation au rabais qui plaît au patronat. Entretien avec Christian Sauce

L’apprentissage est enfin en train d’acquérir ses lettres de noblesse dans notre pays, et de devenir un réflexe de plus en plus partagé par les chefs d’entreprise, les jeunes et leurs familles” : c’est ainsi que la ministre du Travail Elisabeth Borne se félicite, dans une tribune publiée par le journal Les Echos, du développement de l’apprentissage, particulièrement fort, il est vrai, pendant le quinquennat d’Emmanuel Macron (Selon Elisabeth Borne, le nombre d’apprentis aurait doublé en 5 ans). Elle parle même de “révolution culturelle”. En effet, il est devenu banal, courant et peu questionné d’envoyer tous les jeunes enfants d’ouvriers et d’employés en apprentissage, pour les sortir d’un système scolaire jugé peu adapté à leur profil. Concrètement, il s’agit d’une formation en alternance, qui se déroule principalement sur le lieu de travail et dans un Centre de Formation des Apprentis (CFA). L’entreprise se substitue donc à l’éducation nationale dans la formation des jeunes. 

C’était une évolution souhaitée par tous les lobbys patronaux : le MEDEF, dans son programme pour 2022, demande un financement public de l’apprentissage encore plus important. Et nombre de candidats à la présidentielle veulent aller encore plus loin. Bref, s’est formé un véritable consensus politico-médiatique : l’apprentissage, c’est bien. 

En est-on bien sûr ? Est-ce si pertinent de laisser les entreprises privées former nos enfants ? Sortir de l’enseignement scolaire à 15 ans voire 14 ans, n’est-ce pas l’assurance d’être prisonnier de sa branche professionnelle ?  J’ai posé ces questions à Christian Sauce, enseignant de lycée professionnel à la retraite qui parle beaucoup d’apprentissage sur Twitter. Ses alertes récurrentes m’ont donné envie de me pencher sur le sujet et d’en savoir plus.

La plupart des politiques s’enthousiasment de l’augmentation du nombre d’apprentis en France, qu’est-ce que cela vous inspire ?

C’est une question fondamentale. J’avoue même que j’ai parfois du mal à comprendre cette quasi-unanimité de la part de responsables qui ont souvent fait de longues études. Le nombre d’élèves dans l’enseignement professionnel est en forte baisse, celui du nombre d’apprentis en formation par apprentissage est en forte hausse, et les voilà ravis, enthousiastes, certains demandant même d’avancer à 14 ans l’âge d’entrée en apprentissage !

Je ressens un profond malaise devant cet enthousiasme totalement…

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Auteur: Rédaction Frustration Mag