Des planètes sous deux soleils, et comment on les détecte depuis la Terre

Imaginez-vous sur la planète Tatooine, dans La guerre des étoiles. Luke Skywalker regarde avec vous les deux soleils se coucher, de taille et de couleur différentes.

Ce type de planète s’appelle « exoplanètes circum-binaires » : ce sont des planètes en dehors de notre système solaire qui orbitent autour de deux étoiles. La première planète de ce type a été détectée en 2011 grâce au satellite spatial Kepler et s’appelle Kepler-16b… elle a vite été surnommée « Tatooine », bien sûr.

Alors que les étoiles multiples (binaires, triples, ou plus) constituent 85 % des étoiles de la Galaxie, elles ont été largement mises de côté dans la recherche d’exoplanètes, pendant presque 25 ans. Et pourtant, bien qu’elles soient plus difficiles à mesurer que les étoiles isolées, leur étude permet de mieux comprendre comment les planètes se forment, y compris celles qui orbitent autour d’une seule étoile.

Le nouveau programme BEBOP est dédié à la recherche de planètes orbitant autour d’étoiles binaires. Il utilise des télescopes terrestres des hémisphères nord et sud, et donc des méthodes moins coûteuses – et moins polluantes – que les missions spatiales. Il a déjà permis de découvrir de nouvelles planètes circumbinaires… et d’autres doivent être annoncées très prochainement.

Vue d’artiste de la mission

Détecter des exoplanètes qui orbitent autour de deux étoiles depuis la Terre, c’est possible.
Amanda Smith, Fourni par l’auteur

De la fiction à la réalité : les premières découvertes

Depuis la découverte de la première exoplanète en 1995 (qui orbite autour d’une seule étoile), plusieurs milliers d’exoplanètes ont été détectées.

En 2011, le satellite Kepler a utilisé la « méthode des transits » et détecté pour la première fois une planète circumbinaire, Kepler-16b.

La méthode des transits consiste à mesurer la luminosité d’un grand nombre d’étoiles. Dans une configuration particulière d’un système planétaire par rapport à nous, on peut alors assister au passage de la planète devant son étoile. On observe alors une baisse d’intensité lumineuse de l’étoile de façon périodique, qui permet de mesurer le rayon de la planète et sa période orbitale. C’est une configuration particulière du système qui a une faible probabilité d’arriver, d’où le besoin de mesurer un grand nombre d’étoiles pour détecter quelques exoplanètes.

Le système binaire Kepler-16 est composé d’une étoile « K » (un peu plus petite et un peu moins chaude que le Soleil) et d’une petite étoile « M » (de couleur rouge, environ 10 fois moins massive que le Soleil), tournant l’une autour de l’autre en 41 jours. La planète circumbinaire, Kepler-16b, orbite en 228 jours autour de ses deux étoiles. Elle ressemble à Saturne en termes de masse et de rayon, mais elle n’a pas d’anneaux connus.

Par la suite, les données du satellite Kepler et de sa mission étendue et dégradée K2, ont révélé deux autres systèmes de ce type.

Orbites des étoiles et de la planète

Une planète, en bleu, orbite auteur de deux étoiles, en jaune et rouge.
Mengzy, CC BY-SA

Le satellite Kepler n’est maintenant plus en service et son successeur, TESS, n’observe des portions du ciel que sur une durée de 27 jours, ce qui ne permet pas de découvrir des exoplanètes circumbinaires. En effet, ce laps de temps est plutôt de l’ordre de la période orbitale des étoiles entre elles. Pour qu’une planète se trouve de façon stable autour de ces systèmes, il faut plutôt qu’elle orbite à plus grande distance des étoiles, plutôt au-delà de 70 jours de période.

De son côté, le fameux télescope spatial James-Webb se focalise sur des études d’atmosphère ou de l’imagerie, avec peu de cas de systèmes binaires.

Détecter les exoplanètes depuis le sol

Ces 25 dernières années, les chercheurs ont tenté de détecter des étoiles binaires depuis le sol via la « méthode des vitesses radiales ». Cette méthode mesure le décalage spectral des raies des éléments chimiques présent dans l’atmosphère des étoiles. La mesure de ce déplacement permet de déterminer la vitesse des étoiles et de retrouver la masse et la période d’une planète en orbite.

Schéma de la méthode des vitesses radiales

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Auteur: Isabelle Boisse, Astronome adjointe au Laboratoire d’Astrophysique de Marseille, Aix-Marseille Université (AMU)