Des savoirs indigènes pour inventer de nouveaux mondes

« Le monde que nous voulons est fait de beaucoup de mondes. » Cette phrase n’est pas l’accroche d’un nouveau film de science-fiction, mais provient de la quatrième déclaration de la forêt lacandone, énoncée par l’Armée zapatiste de libération nationale en 1996. Elle définit un concept à mille lieues du développement industriel et technologique auquel s’opposaient — et s’opposent encore — les combattants au Chiapas : le « plurivers ». Aussi appelé « multivers », ce sujet donne son titre au volumineux Dictionnaire du post-développement, dont la traduction en français vient d’être publiée aux éditions Wildproject. Une centaine de contributions venues de toute la planète y écrivent, en substance, que d’autres mondes — et non un seul — sont possibles et souhaitables face à la monotonie du « développement ».

Ce dernier concept avait été précédemment battu en brèche en 1992, au sortir de la Guerre froide, dans un Development Dictionary : A Guide to Knowledge as Power. Idéologie activement promue par les puissances occidentales — États-Unis en tête — dans la seconde moitié du XXe siècle, celle-ci aurait dû s’effacer, selon le précédent dictionnaire, avec la disparition de l’ancien bloc soviétique, contre lequel elle servait de rempart dans les pays du Sud global. Qu’en est-il trente ans plus tard ? Certes, l’idéologie du développement a pris du plomb dans l’aile ; même les Nations unies, ferventes promotrices pendant des décennies, ne peuvent plus le vanter en l’état et doivent l’accoler à d’autres concepts, ainsi le fameux « développement durable » à la conférence de Rio en 1992.

Cependant, sous une forme ou une autre, le développement et son lot de pillages, de violences et de catastrophes écologiques se poursuivent dans nombre de pays des Sud, comme le rappelle la première partie du Dictionnaire du post-développement. Deux entrées soulignent ainsi comment le mythe du développement, favorisant l’implantation d’entreprises et de capitaux étrangers, perpétue la violence coloniale et dépossède les peuples de leurs terres en Afrique et en Océanie. L’entrée « Aidland », quant à elle, conteste l’ingérence, voire la mainmise, des grandes ONG internationales — soit des entreprises privées, le plus souvent européennes ou nord-américaines — dans les pays du Sud global.


Des femmes zapatistes de l’Armée zapatiste de libération nationale, en 2007. Flickr/CC BY-NC-ND 2.0/Shannon

En somme, qu’il se targue d’être…

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Auteur: Maxime Lerolle Reporterre