Désir de vide

J’ai entendu dire quelque part qu’on tombe à la rue aussi vite qu’on tombe amoureux. Je trouve la formule pas terrible, mais faut dire qu’elle a le mérite de faire appel à un sentiment commun, répandu, tristement rendu ridicule et désuet pour le comparer à un autre phénomène, lui aussi ridiculisé, bafoué, réduit. Je fais partie des personnes qui déplorent que l’on ridiculise l’amour, mais qui prend pourtant part aussi à sa ridiculisation. Ce qui me plaît dans cette formule c’est le verbe tomber, qu’on utilise également pour dire que quelqu’un tombe enceinte.

Ce texte m’a été inspiré par la prise de parole d’un parlementaire, ancien SDF, qui s’insurgeait face à la nouvelle loi anti-squat, appelée Kasbarian-Berger.

Novembre. En France, le gouvernement cherche à faire passer une nouvelle loi anti-squat. Dans les médias dominants, ceux qu’on voit et ceux qu’on entend, ce sont les quelques proprios qui se retrouvent avec des impayés de loyers. On parle des personnes qui occupent des logements libres comme d’une vermine qui empêche les honnêtes gens de jouir de leur droit de posséder. On ne donne aux pauvres qu’un seul devoir : faire de la place et dégager. Je le rappelle : les personnes qu’on appelle squatteurs sont des personnes qui (dans l’immense majorité des cas) occupent des logements VIDES, inutilisés, vacants, non meublés, non loués, abandonnés, désaffectés, et donc : pas habités. Hantés, peut-être, pas habités. Les personnes visées par cette loi sont des gens qui cherchent un espace et un toit pour (ré)exister, vivre ou survivre, et résister ; donc faire des choses. C’est un problème d’utilité publique, le fait que chacun ait un toit, l’envie de vouloir que tout le monde se loge, devrait concerner tout le monde. Pourtant on n’ose même plus le dire tellement on craint d’être moqué.e.

Exposons d’abord quelques nombres pour les mettre face à quelques chiffres : 3 millions de logements vacants, 4 millions de personnes mal-logées ou pas logées, 170 cas de petits propriétaires squattés ne pouvant pas rentrer chez eux.

Les 4 millions de mal-logé.e.s ce sont plus d’1 million de personnes ne disposent pas d’un logement personnel, elles sont sans domicile fixe, vivent dans des habitations de fortune, sont hébergées chez des tiers ou en chambres d’hôtel ; et plus de 2 millions de personnes qui vivent dans des logements sans confort (pas d’eau courante, pas de chauffage).

À Vence dans la ville où j’ai grandi, 500 appartements sont à…

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Auteur: lundimatin