Une lettre exhumée après la parution en 1985 du livre de Marguerite Duras, La douleur – principalement le récit inquiet d’une attente, l’attente de son mari, Robert Antelme, déporté. La lettre est justement de ce dernier, Robert, elle date de peu de temps après son retour ; elle est adressée à Dionys Mascolo, devenu le compagnon de Marguerite. Elle préfigure en quelque sorte le récit bouleversant qu’il publiera quelques années plus tard : L’espèce humaine.
Mascolo publie et commente cette lettre ancienne qu’il semble découvrir seulement à ce moment, se demandant s’il l’avait vraiment lue auparavant. Mais comment aurait-il pu ne pas la lire, si ce n’est qu’il l’avait opportunément oubliée, occultée peut-être ? À ce moment, Robert Antelme vit encore, sauf qu’il a perdu la mémoire suite à une attaque cérébro-vasculaire. Mascolo ressort les mots de son ami et tente de les commenter, les expliquer, et les défendre, même si l’incompréhension n’est pas exclue, car on ne sait jamais comment l’autre sait pour nous.
« Dans l’enfer, on dit tout, cela doit d’ailleurs être à cela que nous, nous le reconnaissons ; pour ma part c’est comme cela que j’en ai eu la révélation. Dans notre monde au contraire on a l’habitude de choisir et je crois que je ne sais plus choisir. » Ainsi parle Robert Antelme dans la lettre à son ami, avant de lui confier : « Tu es l’un des êtres dont je crains le plus la fatigue, je veux dire le désespoir. »
Ce qu’Antelme dévoile dans ce long message, c’est un monde ignoré qui autrement resterait impartageable et qu’il doit communiquer, au moins à celui qui est son ami, même si cela tient de l’indicible. « Le lieu d’où il parle, dit Mascolo, il nous y a précipités et nous n’en sommes jamais revenus. » Quoique la page du temps ait bien voulu tourner, le déporté se voit pris au piège d’une existence négative et il est…
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Auteur: dev