Données de santé, de fertilité, de localisation… Les craintes post-Roe inédites et légitimes des Américaines

La révocation de l’arrêt Roe v. Wade par la Cour suprême américaine, le 24 juin dernier, est un moment décisif dans la politique américaine. Cette décision retire les protections constitutionnelles du droit à l’avortement et renvoie la question aux États, dont la moitié environ devrait l’interdire.

La dernière fois que l’avortement était illégal aux États-Unis, c’était il y a près d’un demi-siècle… L’époque a changé. Nous vivons désormais dans une ère de surveillance numérique généralisée, rendue possible par le développement d’Internet et des téléphones portables.

Or ces données numériques, surtout les plus personnelles, pourraient bien aujourd’hui être utilisées pour identifier, suivre et incriminer les femmes qui demandent un avortement.

Depuis une vingtaine d’années, les grandes entreprises technologiques, les opérateurs d’applications mobiles, les « Data brokers » ou courtiers en données et les sociétés de publicité en ligne ont mis en place un système complet pour collecter, analyser et partager d’énormes quantités de données – nos données normalement « privées ». Les entreprises peuvent ainsi suivre chacun de nos mouvements, établir le profil de notre comportement et fouiner dans nos émotions.

Jusqu’à présent, ce système a surtout été utilisé pour nous vendre des choses. Mais à la suite de l’arrêt rendu l’été dernier, nombreux sont ceux qui craignent que, désormais, les données personnelles ne soient utilisées pour surveiller les grossesses, puis partagées avec les services répressifs ou vendues à des « justiciers » autodésignés.

(De premières dérives ont été identifiées. La Federal Trade Commission, agence indépendante du gouvernement des États-Unis chargée du respect du droit de la consommation, a intenté une action en justice contre Kochava Inc. le 29 août 2022. La société est accusée de vendre des données de géolocalisation provenant de centaines de millions d’appareils mobiles qui, en l’occurrence, peuvent être utilisées pour « identifier des consommateurs qui ont visité des cliniques de santé reproductive », ndlr.)

Des données partout, sur tout

Il existe diverses sources de données qui pourraient être utilisées pour identifier, suivre et poursuivre les femmes soupçonnées de vouloir avorter.

Google, par exemple, partage régulièrement des informations privées sur ses utilisateurs avec les forces de l’ordre, même sans mandat. Dans ce cas, il pourrait s’agir de mots-clés utilisés lors de recherche en ligne et qui pourraient être utilisés comme preuves par des agences qui enquêtent ou poursuivent des affaires liées à un avortement.

La surveillance en ligne peut également porter sur les données de localisation. La police américaine utilise déjà les données de localisation des appareils mobiles pour recueillir des preuves contre des criminels présumés. (À noter…

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Auteur: Uri Gal, Professor in Business Information Systems, University of Sydney