Du cyanure pour extraire de l'or : en Guyane, une usine « préoccupante »

Cayenne (Guyane), correspondance

À la fin du XIXe siècle, en forêt, les chercheurs d’or créoles venus de toute la Caraïbe et du littoral guyanais baptisaient des lieux au gré des sentiments mêlés que suscite la quête de l’or : Enfin, Pas trop tôt, Perdu temps, Espérance… C’est sur le site dénommé Dieu Merci par les anciens orpailleurs, dans la commune minière Saint-Élie, que l’entreprise Auplata a obtenu l’autorisation d’exploiter la toute première usine de cyanuration de Guyane. Depuis mars 2020, l’entreprise y traite du minerai broyé en poudre dans des cuves avec du cyanure, ce qui permet d’extraire l’or. Les déchets issus de ce procédé — des boues passées par la cyanuration — sont ensuite stockés dans des digues à résidus.

Pour le secteur minier, c’est une première. L’exploitation légale de l’or en Guyane est actuellement menée par des petites et moyennes entreprises qui pratiquent un orpaillage semi-artisanal, avec des méthodes gravimétriques qui consistent à séparer l’or de la roche sans procédé chimique. La cyanuration permet de récupérer plus d’or que la gravimétrie, et est au cœur des projets miniers d’entreprises internationales qui veulent exploiter des gisements d’or primaire, comme celui de la Montagne d’or ou d’Espérance. L’État français voulait faire de l’usine de Dieu Merci un gage de sa volonté d’industrialiser l’exploitation de l’or, vis-à-vis d’un secteur minier échaudé par la prise de distance du gouvernement avec le projet Montagne d’or en mai 2019. Ainsi, en novembre 2019, la ministre des Outre-mer Annick Girardin visitait l’usine de cyanuration de Dieu Merci qui venait d’obtenir une autorisation préfectorale pour entrer en fonction. « Personne n’est “sous cloche” ou empêché, nous avons des exigences environnementales et industrielles qu’il faut respecter, c’est tout ! » annonçait la ministre à son retour de Saint-Élie.

Les petits boudins jaunes représentent les digues. Extrait de l’arrêté préfectoral de mise en demeure du 20 décembre 2021.

Deux ans après ce discours, fin 2021, le préfet de la Guyane Thierry Queffelec signait un arrêté de mise en demeure suspendant le fonctionnement du site industriel. Lors d’une inspection de l’usine effectuée par les services de l’État, « des points préoccupants » portant sur les « mesures de maîtrise des risques » et les « rejets » avaient en effet été identifiés, indique l’arrêté préfectoral. Ces éléments ont…

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Auteur: Hélène Ferrarini Reporterre