Il y a presque deux ans, le 9 avril 2019, nos publiions dans nos colonne une « lettre ouverte au monde de l’art » rédigée par Julien Crépieux. Il déclinait alors une invitation à exposer ses oeuvres pour deux raisons : d’abord parce que « l’urgence de la situation » ôtait tout l’intérêt à ses yeux de se consacrer à son travail artistique ; ensuite parce qu’il rejettait en bloc « l’inconsistant milieu qu’on appelle « art contemporain » (quelle idiotie, comment l’art pourrait-il être autre chose que contemporain) ». Aujourd’hui, nous publions un entretien réalisé par Sophie Lapalu dans lequel il revient sur l’art, les tags (qu’il « collectionne » sur son compte Facebook), la mémoire des luttes, la Commune de Paris et se demande « De quoi les gens auront-ils besoin pour bloquer le pays ? ».
Sophie Lapalu : Le 9 avril 2019, alors que le mouvement des gilets jaunes a commencé 8 mois auparavant, tu publies dans lundimatin l’e-mail que tu as envoyé à une institution (que tu gardes anonyme) qui t’invite en tant qu’artiste. Cette lettre explicite ton refus d’y exposer. Pourquoi fallait-il rendre publique ce refus ? Est-ce est une façon d’en faire un acte militant ?Julien Crépieux :Ce n’était pas prémédité, ça s’est fait comme ça. À mesure que je déclinais cette invitation par écrit, je sentais bien que j’étais en train de lâcher ce que j’aurais souhaité dire à d’autres. C’est pourquoi, quelques jours après avoir envoyé l’e-mail, je l’ai publié sur un réseau social. C’était d’abord par curiosité, pour observer les réactions, et puis ça a commencé à circuler là où je ne m’y attendais pas. À l’époque, j’échangeais un peu avec l’équipe de lundimatin, et je le leur ai envoyé, non pas pour qu’ils publient, mais parce que j’étais curieux de leur réaction. Ils ont aimé et l’ont publié dans la foulée. Personnellement, je trouve le texte assez mauvais, mais c’est un cri de colère spontané, un peu comme le geste de cette brave Corinne Masiero récemment aux Césars. Un secouement de cocotier, rien de plus. Tu connais, j’imagine, le projet de grève de Gustav Metzger, Art Strike 1977–1980. Il appelait à ne pas produire ni vendre d’œuvres, comme à ne pas organiser d’exposition et à refuser la collaboration avec toute forme de « machinerie médiatique » afin de démanteler le système marchand de l’art. « L’idée était d’appeler les artistes à être très actifs dans la compréhension de la…
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Auteur: lundimatin