Écoanxiété : « On veut soigner les individus, mais c'est le système qui est malade »

[2/3 L’écoanxiété, le mal de l’époque] L’angoisse liée à la crise climatique a désormais un nom : l’écoanxiété. Comment les jeunes vivent-ils en s’attendant au pire ? Pourquoi l’écoanxiété est-elle devenue un outil au service du pouvoir ? Comment les émotions peuvent-elles devenir une arme politique ? Enquête en trois parties.

Partie 1 — Écoanxiété : ces jeunes racontent le mal qui les ronge


Les saccages écologiques jouent sur notre santé mentale. Leur spectacle nous afflige et nous plonge dans un état de sidération. La Terre se meurt, son silence nous glace. Depuis des années, chercheurs, médecins et philosophes s’intéressent aux émotions engendrées par la crise environnementale. L’Anthropocène serait, selon eux, l’âge des « passions tristes », le règne du deuil et de la perte, de l’angoisse et de la peur.

Pour qualifier ces affects qui gagnent la société, l’écopsychologue Joanna Macy parle de « peine pour le monde ». Face à des écosystèmes bouleversés que l’on ne reconnaît plus, le philosophe Baptiste Morizot évoque, quant à lui, un « mal du pays sans exil ». Nous sommes pris de vertige. La dévastation de la planète engendre une blessure intime, un effondrement intérieur. « Il est presque impossible d’accepter toute la vérité sur ce que nous avons fait subir à la Terre, j’ai vu des gens vivre avec cette idée au quotidien, ils ont développé une forme de folie », assure le philosophe Clive Hamilton.

Cette terreur nous hante. « Je veux que vous paniquiez, je veux que vous ressentiez la peur que j’éprouve tous les jours », lançait, en 2019, Greta Thunberg aux dirigeants du monde réunis à Davos, en Suisse. Son cri faisait écho à celui de toute une génération incapable de se projeter dans l’avenir. Des centaines de milliers de jeunes se disent en détresse.

Différentes études révèlent l’ampleur du phénomène. Aux États-Unis, des psychiatres américains ont même créé la « Climate Psychiatry Alliance », pour « sensibiliser la profession et le public aux impacts profonds de la crise climatique sur la santé et le bien être ». L’association des psychiatres américains pense également que « le changement climatique peut accroître les pathologies liées au stress comme les addictions, les troubles anxieux et la dépression ».

En 2018, une étude publiée dans Nature Climate Change estimait même que le nombre de suicidés pourrait augmenter de…

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Auteur: Gaspard d’Allens (Reporterre) Reporterre