En Afrique du Sud, « si Total réalise ses projets, l'océan sera détruit »

Paris, reportage

La voix est calme, le ton ferme. « Total doit quitter nos eaux. » Originaire du village de Sicambeni, à l’est de l’Afrique du Sud, Ntsindiso Nongcavu pêche depuis ses 12 ans. Du homard, des moules, des huîtres sauvages, capturés de manière artisanale, dans le respect des limites écosystémiques et des savoirs traditionnels autochtones. Un équilibre unique qu’il estime menacé par les activités du pétrolier français au large des côtes sud-africaines. « Si Total réalise ses projets, beaucoup perdront leur travail. L’océan sera détruit, et notre culture avec. »

En compagnie de quatre autres pêcheurs et activistes écologistes sud-africains, accueillis par l’association de défense des océans Bloom, Ntsindiso Nongcavu était à Paris, le 6 février, pour demander au gouvernement et aux investisseurs français de mettre fin aux projets gaziers de TotalÉnergies en Afrique du Sud. Il y a six mois, la multinationale a demandé une licence de production pour exploiter les immenses champs gaziers de Luiperd et Brulpadda, situés jusqu’à 1 800 mètres de profondeur au large de Mossel Bay, près du cap de Bonne-Espérance. 3 milliards de dollars devraient être investis dans ce chantier gargantuesque, dont TotalÉnergies espère tirer 1 milliard de barils d’équivalent pétrole.

Le groupe français porte également deux projets d’exploration en mer, respectivement au large de la capitale, Le Cap, et au sud de la frontière namibienne. Autant de « bombes climatiques » qui risquent non seulement d’accélérer l’emballement de la température mondiale, mais également de détraquer la vie des animaux marins et des humains qui en dépendent.

« Ma vie entière est suspendue à ces projets »

Pour Christian Adams, pêcheur artisanal de Steenberg’s Cove, sur la côte ouest du pays, les zones sur lesquelles TotalÉnergies a fait main basse ne sont pas que de simples lignes sur une carte. « Ma vie entière est suspendue à ces projets, dit-il à Reporterre d’une voix rapide, les mains croisées sur ses genoux. Mon existence et celle de milliers d’autres pêcheurs pourraient être détruites. » Sous son bonnet blanc, le regard du quadragénaire s’assombrit. « Ils veulent nous prendre notre dignité, notre capacité à subvenir aux besoins de nos enfants. Moi, je ne peux pas envoyer les miens à Yale ou Harvard, comme ceux qui tirent profit de cette industrie. »

À tous les endroits où Christian Adams pêche, TotalÉnergies veut réaliser des relevés sismiques, construire des pipelines ou installer des plateformes de forage. Le pêcheur craint que cela n’affecte durablement les populations de « snoek », un petit poisson de la famille des maquereaux déjà mis en peine…

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Auteur: Hortense Chauvin Reporterre