En Isère, l'industrie électronique boit toute l'eau

Grenoble, reportage

Un matin de décembre, des passants du centre-ville de Grenoble ont découvert, un peu intrigués, un empilement de bouteilles sur le trottoir. 336 bouteilles d’un litre chacune, déposées devant Eaux de Grenoble Alpes, la société chargée du service de l’eau dans l’agglomération. Ces 336 litres représentent la consommation d’eau par seconde — estimée à l’horizon 2023-2024 — des usines STMicroelectronics et Soitec. Installées dans la vallée du Grésivaudan près de la métropole, elles produisent des semiconducteurs, que l’on trouve dans la plupart des objets électroniques.

C’est le collectif citoyen Stop micro qui a entassé les bouteilles, et appelé à une manifestation autour d’un cri de ralliement : « De l’eau, pas des puces ! » « Notre collectif relaie la colère de celles et ceux qui voient des entreprises polluer et piller des ressources communes pour la création de besoins artificiels, et à notre sens nuisibles, qui nous semblent complètement déconnectés de l’urgence climatique dans laquelle nous sommes », explique un représentant de Stop micro à Reporterre. « Les cartes à puce, ça ne se mange pas ! », souligne de son côté Corentin, un maraîcher venu manifester. 

Le collectif s’est monté après un été 2022 marqué par un épisode de sécheresse d’une ampleur quasi inédite… et une annonce qui a fait du bruit. Mi-juillet, le groupe franco-italien STMicroelectronics a dévoilé son projet de construction d’une nouvelle usine de production de plaquettes de silicium 300 millimètres, sur son site de Crolles, dans le Grésivaudan, avec son partenaire américain GlobalFoundries. C’est dans ces disques de la taille d’une assiette, qui permettent de conduire ou bloquer le courant électrique, que sont gravées les puces. On les retrouvera dans les ordinateurs, les voitures, les consoles de jeux, les objets connectés, les téléphones ou l’électroménager.

Le site va doubler de taille

Avec cet investissement, STMicroelectronics veut doubler les 15 000 m2 de son usine de Crolles, déjà agrandie à plusieurs reprises ces dernières années. Le groupe, qui affiche une croissance à deux chiffres, injectera 5,7 milliards de dollars (5,3 milliards d’euros) dans le projet avec son partenaire. D’ici 2026-2027, le site devrait atteindre sa pleine capacité et produire de 20 000 à 22 000 plaquettes par semaine.

Venu cet été sur le site de Crolles, le président de la République Emmanuel Macron a salué le projet comme « un grand pas pour notre souveraineté industrielle ». L’État doit apporter un important soutien financier, dont le montant n’a pas encore été dévoilé, via son plan Électronique 2030. Car l’enjeu dépasse les…

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Auteur: Raphaëlle Lavorel Reporterre