En Martinique, des solutions agricoles émergent pour éliminer le chlordécone

Morne-Rouge (Martinique), reportage

Il faut grimper par la sinueuse route de la Trace pour arriver dans la commune du Morne-Rouge, située au nord de la Martinique et dominée par la montagne Pelée, que la nuée dévoile parfois. Fougères arborescentes, lianes, balisiers, bambous géants et autres exubérances tropicales abritent rivières et cascades et ombragent ce trajet verdoyant au cours duquel l’atmosphère, humide, se rafraîchit peu à peu.

Dans ce territoire vallonné, la forêt, défrichée par endroits, laisse place à de grandes étendues. Là, la richesse des sols volcaniques combinée à une forte pluviométrie et à la chaleur — certes plus modérée que dans les plaines — profitent à l’agriculture. Cette luxuriance masque une tragique réalité : en 2015, 10 000 hectares apparaissaient contaminés au chlordécone sur les 25 000 hectares de surface agricole utile que compte la Martinique.

Pesticide organochloré, le chlordécone a été autorisé sur les territoires français à partir de 1972 et utilisé à grande échelle jusqu’en 1993 dans les bananeraies antillaises pour lutter contre le charançon. Il était pourtant interdit en France depuis 1989. La culture de la banane et de la canne à sucre occupent aujourd’hui la majorité du foncier agricole de la Martinique. Des monocultures intensives qui, en plus d’entraver l’autosuffisance alimentaire de l’île, ont pollué durablement les sols. Il faudra environ sept cents ans pour que la molécule de ce pesticide organochloré disparaisse, si rien n’est fait. Bien que lourde et peu mobile, elle s’est répandue dans les cultures en aval des bananeraies et dans les rivières et nappes phréatiques, à cause du lessivage des sols par la pluie.

Plus de 90 % des Guadeloupéens et Martiniquais contaminés

Si les ouvriers agricoles qui ont épandu manuellement Képone et Curlone (ses noms commerciaux), sans contrôle des dosages, sont les premières victimes de ce produit cancérogène et perturbateur endocrinien, plus de 90 % des Guadeloupéens et des Martiniquais sont contaminés. La Martinique détient de ce fait le record mondial du cancer de la prostate, avec près de 230 nouveaux cas pour 100 000 hommes chaque année.

Depuis le début des années 2000, pour être mises sur le marché, les denrées alimentaires végétales ou animales doivent présenter des contaminations inférieures ou égales à 20 microgrammes par kilogramme. L’alimentation est en effet la principale voie de contamination de la population. D’aucuns parlent d’un…

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Auteur: Reporterre