En montagne, le vent de fraîcheur des nouveaux bergers

Chaque année, à l’heure où éclosent les pétales roses des rhododendrons, bergères et bergers guident leurs troupeaux vers les pâturages. Là-haut, du printemps à l’automne, elles et ils veillent à la bonne santé du bétail et façonnent les montagnes de leur savoir-faire ancestral. Aujourd’hui pourtant, un vent de fraîcheur, porté par de jeunes urbains lassés des villes, semble venir dépoussiérer la profession.

Une nouvelle génération de néo-bergers est née. Aux yeux de Guillaume Lebaudy, ethnologue spécialisé en pastoralisme, ces salariés, embauchés par les éleveurs restés dans la vallée, ne sont pas apparus hier. Dès le début des années 2000, une vague de jeunes, au niveau d’études assez élevé, a débarqué dans ce monde rural en quête d’un autre chemin. « Ils rejoignent en quelque sorte ce mouvement de désertion que l’on observe cette année dans les grandes écoles, dit-il à Reporterre. On crie à la nouveauté, mais il n’en est rien. »

La nouveauté réside en revanche dans leurs moyens d’accéder à la profession : « Dans les années 1950, ce monde-là était très fermé. Les anciens ne disaient pas un mot, il fallait les observer pour “voler” le métier », poursuit l’ethnologue. Désormais, trente-six façons s’offrent aux novices, à commencer par les trois écoles de bergers que compte la France. Les bergers les plus aguerris se filment et partagent également une flopée de conseils sur les réseaux sociaux, sous le regard circonspect mais rieur des plus âgés.

De plus en plus de femmes semblent par ailleurs embrasser cette vie de bergère, occupant aujourd’hui jusqu’à un tiers des estives. « Il est toutefois délicat de parler d’une féminisation du métier, tempère Tara Bate, anthropologue. À travers la littérature, la culture picturale ou les chansons populaires, on s’aperçoit qu’elles ont toujours été là. » La mise en lumière récente de leur présence a cependant encouragé de petites évolutions, les employeurs refusant de les faire travailler sans un confort minimal : « J’ai entendu des histoires de bergères qui se faisaient livrer du bois par les éleveurs. Jamais, ils n’auraient fait ça pour un homme », s’amuse la réalisatrice du documentaire Donner le biais, donner la vie.

« Une connexion intime avec ce territoire »

Déjà, à l’époque du mouvement hippie, de nombreux bergers néophytes avaient quitté la ville, venant s’installer en Ardèche et ailleurs pour produire du fromage ou garder des chèvres et des…

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Auteur: Emmanuel Clévenot Reporterre