En Tunisie, une reprise en main du pouvoir sécuritaire ?

Depuis le début du mois de février 2023, en Tunisie, plusieurs vagues d’arrestations ont frappé des figures de l’opposition et des militants accusés par le président Kaïs Saïed de « traîtrise » et de « complot », indiquant une accentuation du tournant autoritaire du pouvoir. Aussi, le président tunisien a prononcé un discours notablement raciste le 21 février dernier qui a particulièrement choqué en ce qu’il reprend pleinement la thématique du « grand-remplacement » des courants néofascistes européens.

Dans cet article, la sociologue Héla Yousfi analyse les mécanismes à l’oeuvre derrière cette dynamique néolibérale et autoritaire, depuis le soulèvement du 17 décembre 2010 à nos tristes jours.

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La dernière vague d’arrestations en Tunisie ciblant plusieurs personnalités, des politiques comme des hommes d’affaires accusées de complot contre la sureté de l’État, laisse penser que la Tunisie vit un moment décisif de son histoire, dans lequel le projet d’une alternative politique et économique viable rêvée par les Tunisiens, lors du soulèvement du 17 décembre 2010 est sérieusement mis en péril[1]. Cette campagne d’une ampleur sans précédent depuis le départ de Ben Ali relance les inquiétudes de l’avènement d’un nouveau régime autoritaire dans un contexte social et économique de plus en plus tendu. S’ajoute à cela le communiqué de la Présidence du 23 février 2023, issu d’une réunion avec le conseil national de sécurité, qui prône des « mesures urgentes » contre l’immigration clandestine de ressortissants de pays d’Afrique subsaharienne, affirmant que leur présence en Tunisie est source de « violence, de crimes et d’actes inacceptables », consacrant ainsi un virage raciste aux dérives autoritaires.

Ces derniers évènements pris ensemble confirment un constat : la tentative du pouvoir sécuritaire composé du système judiciaire, de la police et de l’armée de se réorganiser avec le leadership de Kaïs Saïed. L’État et la société se trouvent face à un risque sans précédent.  Douze ans après le départ de Ben Ali, le verdict est sans appel : les Tunisiens se trouvent avec un État en déliquescence, maintenu tant bien que mal par un pouvoir sécuritaire auquel ne reste que la répression comme ultime moyen de subsister. Et ce qui frappe face à ce péril, c’est l’incapacité des différents dirigeants politiques qui se sont succédés au sommet du pouvoir depuis le 14 janvier 2011 à évaluer l’impact des décisions…

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Auteur: redaction