Entretien avec le cinéaste israélien Avi Mograbi pour « Les 54 premières années. Manuel d’occupation militaire »

Dans son précédent film, Between the Fences, Avi Mograbi filmait dans le désert, à la frontière sud d’Israël, la vie en sursis d’un camp de migrants demandeurs d’asile. Pour son nouveau long-métrage, Les 54 Premières années – Manuel abrégé d’occupation militaire, il retrouve le salon de son propre appartement à Tel-Aviv, lieu mythique et laboratoire de toutes ses aventures cinématographiques. C’est dans ce salon qu’on rencontre le personnage d’un journaliste de gauche qui tombe sous le charme du criminel de guerre Sharon  (Comment j’ai appris à surmonter ma peur et à aimer Ariel Sharon, 1996), que l’on assiste aux bagarres entre un réalisateur, sa femme et son producteur (Août avant l’explosion, 2002) ; et qu’on voit le cinéaste essayer de dissimuler son identité sous une cagoule (Z32, 2008)… Tous ces personnages sont fictionnels, et en même temps tous portent le nom d’Avi Mograbi. Ces allers-retours entre fiction et documentaire, entre mise en scène et simple enregistrement, ne sont pas là pour démasquer la réalité derrière l’illusion mais plutôt pour mettre en évidence l’illusion partout présente dans la réalité de la vie israélienne.
Côté documentaire, Les 54 premières années expose une anthologie de témoignages d’anciens soldats israéliens. Côté fiction, Avi Mograbi y campe le personnage d’un moderne Machiavel qui expose à un prince imaginaire l’essentiel de ce qu’il faut savoir pour s’approprier la terre d’autrui. Le film a été présenté en 2021 au festival de Berlin. Depuis, il a circulé dans un grand nombre de festivals partout dans le monde. Jusqu’au 23 juillet prochain, on peut le voir sur le site internet de la chaine franco-allemande Arte

Partons de la partie documentaire : qui sont ces témoins qui s’expriment devant la caméra  ? Comment les as-tu rencontrés  ?

Depuis plusieurs années, je fais partie de l’association Breaking the Silence, une ONG dont le but est précisément de récolter les témoignages d’anciens soldats de l’armée israélienne et qui ont servi dans les territoires occupés. BTS n’a pas pour objectif de faire des films à valeur artistique. On se limite à enregistrer et à archiver. Les responsables de l’association m’ont proposé de réaliser une simple mise bout à bout d’un certain nombre de ces entretiens. En y travaillant, j’ai eu l’idée de ménager une sorte de dialogue entre les témoignages. J’ai demandé à BTS si je pouvais utiliser le matériau pour faire un vrai…

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Auteur: Le Média