Éric, éleveur, pleure son troupeau perdu à cause de normes absurdes

« C’était le 10 novembre. » Cette date, Éric ne l’oubliera jamais. Ce jour-là, la directrice de la DDPP de Haute-Savoie — les services sanitaires de la préfecture — est venue sur sa ferme. « Je les ai reçus exprès au milieu du troupeau, pour leur montrer. Les vaches venaient se faire câliner. » C’est que l’éleveur savait ce qu’on allait lui annoncer. « Elle ne m’a pas regardé dans les yeux, elle fixait ses souliers. Et elle m’a dit : “On va faire abattre votre troupeau”. » Le résultat des analyses venait d’arriver : une de ses vaches était bien atteinte de brucellose.

Elle semblait en pleine santé, pourtant, comme le reste du troupeau. « Elle avait vêlé le 14 septembre de deux petits », se souvient précisément Éric. Ses premiers veaux. Elle a été éliminée. Le reste du troupeau doit bientôt suivre, pour une seule vache positive. « J’ai 58 ans, dont cinquante au milieu des vaches, j’ai monté ce troupeau avec mon père puis ma compagne… et on ne discute de rien, c’est acté sans qu’on vous ait posé la moindre question », constate-t-il.

Les éleveurs sont confrontés à des normes d’un autre temps

La brucellose est une maladie étroitement surveillée et réglementée. L’Union européenne la classe dans la catégorie des affections à « éradication obligatoire ». Comme tous les éleveurs laitiers de Haute-Savoie, Éric fait une analyse de lait par mois pour vérifier son absence. Chez les vaches, elle provoque avant tout des avortements. La bactérie peut infecter de nombreuses espèces animales, elle est transmissible aux humains en cas de contact étroit avec un animal malade ou de consommation de lait cru contaminé. « En général, cela provoque une fièvre d’une dizaine de jours. Les formes graves et chroniques sont rares chez les humains », explique Coralie Amar. Vétérinaire, choquée par ce qui arrive à Éric, elle a décidé de l’aider. « On la surveille surtout parce que c’est une maladie commerciale », estime-t-elle.

« Sur la chaîne d’abattage, des veaux vont sortir vivants de leur mère »

Cet unique cas positif pourrait remettre en cause le statut « indemne de brucellose » de la France, et ses exportations de veaux et produits laitiers. « Ce sont des engagements internationaux pris dans le cadre de l’OIE [Organisation mondiale de la santé animale] », explique Bernard Mogenet, éleveur et président de la FDSEA des deux Savoie. Il a assisté aux réunions interministérielles à la suite de la détection du cas….

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Auteur: Marie Astier (Reporterre) Reporterre