Espionnage du journal Fakir : LVMH a payé 10 millions d’euros à l’État pour éviter un procès

Dans une tribune publiée au Monde le 17 février, un collectif d’associations anticorruption et de journalistes dénonce la convention judiciaire qui a récemment permis à la société LVMH d’éviter un procès pénal en échange d’« un chèque de 10 millions d’euros ».

Propriété du milliardaire Bernard Arnault, le géant mondial du luxe était accusé d’avoir fait espionner, entre 2013 et 2016, l’équipe de Fakir, le journal indépendant que François Ruffin – devenu député LFI de la Somme – dirigeait à l’époque.

Pour « infiltrer » et « surveiller » l’organe de presse, l’ancien vice-président de LVMH, Pierre Godé, aujourd’hui décédé, avait fait appel aux services du sulfureux Bernard Squarcini, sans qu’on sache si ces ordres émanaient directement de Bernard Arnault.

Ancien directeur du renseignement intérieur (DGSI, de 2008 à 2012), reconverti dans le conseil et sous contrat avec LVMH, Bernard Squarcini avait mobilisé ses réseaux d’enquêteurs privés et engagé la société d’intelligence économique I2F, elle-même dirigée par l’ancien policier Hervé Séveno, avec lequel il avait collaboré.

Ce groupe de taupes et de détectives travaillant pour le compte de Bernard Squarcini avait fourni à LVMH toute une série de renseignements sur « la mouvance Fakir » : trombinoscope de l’équipe du journal, échanges de mails, comptes-rendus de réunions, immatriculation d’une voiture de la rédaction, informations relatives à la vie privée de François Ruffin, résultats de filatures, etc.

En l’espace de deux ans, ces investigations peu concluantes, à la limite de l’amateurisme, auraient coûté au moins 400 000 euros à LVMH.

En 2015, Bernard Squarcini était notamment chargé d’enquêter sur le long-métrage Merci Patron !, alors en cours de tournage.

Récompensé en 2017 du César du meilleur documentaire, ce film raconte comment un couple de Valenciennois, criblés de dettes, se sont retrouvés au chômage après la délocalisation de l’entreprise Ecce, sous-traitant de LVMH, en Pologne. Sur un ton truculent et satirique, François Ruffin y met en scène ses tentatives infructueuses d’engager un dialogue avec Bernard Arnault.

Au cours de cette affaire à tiroirs, Bernard Squarcini et ses sbires avaient tenté de mettre la main sur une copie du documentaire avant sa sortie, en vain. Ils souhaitaient également empêcher l’équipe du journal de s’inviter à une assemblée générale de LVMH pour interpeller Bernard…

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Auteur: Augustin Langlade