Et si la clé des origines du langage se trouvait dans le cerveau des singes ?

Hôpital Bicêtre, Paris, milieu du XIXe siècle : le docteur Paul Broca rencontre un nouveau patient extraordinaire. Il semble tout à fait normal, mais lorsque le docteur l’interroge sur son mal, il répond simplement : « tan » !

Il s’avère que « Monsieur Tan », comme on l’appellera plus tard, comprend parfaitement ce qu’on lui dit, mais il lui est impossible de répondre par un autre mot que « tan », qu’il répète inlassablement. Après son décès, Broca a découvert la raison de cette perte de production de la parole : une lésion du cerveau frontal gauche.

Depuis cette découverte, « l’aire de Broca » est entrée dans l’histoire comme l’aire de la production de la parole. Et plus récemment, la fonction de cette région a été affinée et inclut désormais d’autres propriétés comme la sémantique, la planification motrice dans le geste ou encore la syntaxe. La syntaxe concerne les règles grammaticales qui structurent une phrase, mais aussi la syntaxe dite « motrice » à savoir toute séquence d’actions emboîtées, comme les gestes, l’utilisation et la fabrication d’outils ou conduire une voiture par exemple. Pour toutes ces actions, votre aire de Broca est activée !

De telles fonctions motrices au cœur de cette zone clé du langage interrogent. Ne constituent-elles pas des traces de notre ancien système de communication hérités de nos ancêtres ?

Une origine gestuelle du langage ?

Répondre à cette question évolutive n’est pas aisé. Même si les tissus mous comme le cerveau ne se fossilisent pas, il est possible de spéculer sur les fonctions cognitives de nos ancêtres en s’appuyant, comme le font les paléoanthropologues, sur les traces archéologiques qu’ils ont laissées incluant les fossiles de leurs ossements, notamment ceux de leur crâne (à l’intérieur duquel leur cerveau a laissé de précieuses empreintes), leurs outils et autres créations. Une autre approche complémentaire, prisée par nous primatologues, consiste à s’appuyer sur l’étude de nos cousins primates. Nous partageons, en effet, avec eux des ancêtres communs relativement récents dans l’histoire de l’évolution. Imaginez que l’on découvre des points communs, on pourrait reconstruire ainsi les traits cognitifs hérités de ces fameux ancêtres communs.

Dans cette approche dite « comparative » entre espèces, des chercheurs ont découvert que la communication gestuelle…

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Auteur: Yannick Becker, Chercheur postdoctoral en primatologie, Max Planck Institute for Human Cognitive and Brain Sciences