Il est de plus en plus courant que celles et ceux qui participent à des luttes, notamment écologistes, se retrouvent devant les tribunaux. Il arrive alors que pour leur défense, des témoins-experts de toutes sortes soient appelés à la barre. Ces membres de la société civile sont alors soumis aux us et coutumes d’une justice rarement connus du grand public. Deux chercheurs invités à témoigner lors d’un procès en ont donc profité pour prendre quelques notes. Récit d’une attente, d’une thérapie policière, et d’un kebab en province.
Scène 0 – Ici, tout est gris
À l’approche du tribunal, les places de parking se font de plus en plus rares, et on aperçoit un petit barrage de policiers. On a oublié notre convocation chez nous. Heureusement qu’une avocate nous aperçoit en train de nous dépatouiller face au chef du barrage, qui nous dit bien que si on ne l’a pas demain, on ne pourra pas revenir. On aurait aimé revenir, mais on a d’autres choses de prévues – des terrains, des conférences, des trucs de gens qui cherchent des trucs. Enfin, tout dépendra de la longueur des débats, pas de nous. Si on nous demande de revenir le lendemain pour témoigner, on reviendra le lendemain pour témoigner. Un engagement est un engagement. Mais ce serait emmerdant. Et puis on a été convoqués par un huissier, ça manque d’humour les huissiers.
On arrive dans le tribunal, bâtiment tout à la fois refait à neuf et en travaux, les avocats nous invitent à passer devant tout le monde, c’est gênant ce passe-droit. On cherche à aller aux toilettes avant l’audience, on ne sait jamais combien de temps ça va durer, mais on nous fait comprendre assez vite que c’est compliqué : à cause du chantier, il n’y a qu’une seule toilette pour l’ensemble du public. Voyant la queue au loin, on se résigne. Direction la salle d’audience, où l’huissière nous invite à nous regrouper, « nous les témoins », sur ce banc….
Auteur: dev