Explosion des prix du carburant : la détresse des pêcheurs

Lorient (Morbihan), reportage

Sur un rond-point, une banderole donne le ton : « Pêcheurs en détresse. Mayday. » Un visage triste griffonné au marqueur ponctue le message. Il faut encore parcourir une centaine de mètres avant d’atteindre le port de pêche de Lorient-Keroman, niché entre les grues et les silos d’une zone industrielle. Sur le quai, des marins rincent les coques de leurs bateaux avant de prendre la mer. Sans beaucoup d’entrain. Depuis le 10 mars, le prix du gazole de pêche oscille autour de 1 euro par litre, soit plus du double des prix affichés l’année dernière à la même période. « On n’avait jamais atteint ce niveau-là, soupire en tirant sur sa cigarette un matelot aux cheveux argentés, dans le métier depuis ses 14 ans. Ça ne vaut pas le coup. »

Du 14 au 22 mars, les pêcheurs ont cessé leurs activités afin de protester contre cette flambée des prix. Un cordage installé entre les rives du bassin empêchait l’entrée et la sortie des bateaux. Après plusieurs jours passés à se réchauffer autour de feux de pneus et de palettes, ils ont finalement décidé de reprendre la mer, avec inquiétude. « Tout le monde est fatigué, dépité », dit David Le Quintrec, patron du fileyeur Izel Vor II. L’aide de 35 centimes par litre de gazole proposée par le gouvernement n’a pas convaincu les pêcheurs. Seul le blocage du prix du carburant de pêche à 60 centimes le litre pourrait selon eux soulager la flottille.

Les équipages préparent leurs bateaux avant de partir pour plusieurs jours de pêche à la langoustine. © Hortense Chauvin/Reporterre

Le secteur dépend fortement des énergies fossiles. En moyenne, un bateau de 12 mètres comme celui de David Le Quintrec consomme 2 927 litres de carburant par mois, selon l’observatoire Amarrée. Ce chiffre varie en fonction de la distance parcourue par les navires et du type de pêche pratiquée. Il croît de manière vertigineuse pour les chalutiers, qui attrapent poissons et langoustines en traînant de lourds filets derrière eux. Les plus gros consomment plus de 38 000 litres par mois.

« Ça fait moins de salaire pour les gars »

L’envolée des cours depuis le début de la guerre contre l’Ukraine se fait lourdement ressentir. Benjamin Camenen, qui commande Le Breizh, un chalutier artisan de 16,50 mètres, a vu ses charges augmenter de 1 200 euros par jour. Sur le quai, son équipage finit de se préparer avant le départ. Trois jours de mer les attendent. Le ronronnement du moteur couvre les cris des mouettes qui…

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Auteur: Hortense Chauvin (Reporterre) Reporterre