Explosion d’un camion de gaz à Fillinges : comment éviter une nouvelle catastrophe ?

Un accident de poids lourd a eu lieu le 20 janvier 2023 vers 8H00 dans la vallée du Giffre (Haute-Savoie) et a donné lieu à une importante explosion. Deux zones d’habitations et une dizaine de maisons ont été impactées par l’explosion. Le bilan provisoire fait état de 21 personnes impliquées dont 2 blessés sérieux hospitalisés.

Selon la préfecture de Haute-Savoie, l’origine de l’explosion faite suite à l’incendie du véhicule tracteur du camion-citerne de gaz. Cet incendie a provoqué une surchauffe de la citerne et son explosion. Qu’est-il passé ? Peut-on éviter ce genre d’accident ?

Que s’est-il passé ?

Le camion qui a explosé transportait un mélange de propane et de butane appelé GPL (gaz de pétrole liquéfié). Ce mélange provient des raffineries, la composition est variable et dépend de son utilisation (réservoirs de gaz domestiques ; bouteilles de gaz, GPL carburant). Pour transporter une quantité suffisante par camion il est nécessaire de liquéfier ce gaz. En effet, sous forme gazeuse et à pression ambiante, un camion de 10 m3 ne pourrait transporter que 18 kg de gaz alors que sous forme liquide il peut en transporter plus de 4 tonnes. La liquéfaction de ce gaz est obtenue par mise sous pression, typiquement de l’ordre de 7 bars à 15 °C. Les camions de GPL (qu’on peut aussi appeler propane quand il est très riche en propane) contiennent donc du gaz liquéfié et sous pression.

Lorsque la température du liquide monte, par exemple sous l’effet de la chaleur lors d’un incendie, la pression monte également et peut atteindre une valeur à laquelle le réservoir ne résiste plus. Il cède et libère l’énergie sous forme d’une explosion. C’est une explosion très spécifique qu’on appelle le BLEVE.

Le BLEVE, une explosion spécifique

Le BLEVE est un acronyme anglais qui signifie Boiling Liquid Expanding Vapor Explosion (Expansion explosive de la vapeur d’un liquide en ébullition). Ce qui est fondamental dans le cas d’un BLEVE, c’est qu’il ne s’agit pas d’une explosion liée à une réaction chimique. Dans le cas des explosifs solides (TNT par exemple) ou de l’inflammation d’un gaz, c’est la combustion très rapide de la matière qui libère l’énergie sous forme d’explosion : c’est une explosion chimique. C’est ce qui se passe lorsqu’une fuite de gaz naturel dans un immeuble est enflammée et provoque une explosion.

Dans le cas d’un BLEVE, on parle d’explosion physique. Il n’est pas nécessaire d’avoir une inflammation de la matière contenue dans le réservoir pour observer ce phénomène. Certaines matières comme le chlore gazeux liquéfié par exemple ne sont pas combustibles et peuvent donner lieu à un BLEVE.

Pour bien comprendre ce type d’explosion, il faut savoir qu’une explosion est créée par une augmentation locale et très rapide de la pression, qui se propage ensuite sous forme d’une surpression aérienne dans toutes les directions de l’espace. Cette surpression diminue progressivement avec la distance et finit en simple bruit.

Dans le cas d’une explosion chimique, c’est la combustion qui créée beaucoup de gaz de combustion à très haute température dans un temps tellement court que les gaz n’ont pas le temps de s’évacuer : il s’ensuit une augmentation de pression locale qui va se propager.

Dans le cas d’une explosion physique la pression vient le plus souvent du fait que la pression était déjà présente avant l’accident. C’est le cas de bouteilles d’air comprimé par exemple, ou tout simplement un pneu de vélo. Lorsque le confinement cède, la pression est libérée sous forme d’une onde de surpression aérienne.

Pourquoi une explosion si puissante ?

Le BLEVE est une explosion physique, mais qui présente une spécificité qui explique la puissance de cette explosion. En effet, si l’on revient à l’accident de Fillinges, le propane liquide dans le réservoir était monté à une température plus élevée mais l’état liquide était maintenu car le réservoir intact permettait de monter en pression. Le propane était en équilibre avec sa vapeur.

Le retour d’expérience montre que la rupture du réservoir survient le plus souvent sur la partie supérieure. En effet, le métal de la partie inférieure du réservoir est en contact avec le liquide qui a un effet de refroidissement du métal par l’intérieur, ce que la…

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Auteur: Frederic HEYMES, Enseignant Chercheur en risques industriels, spécialiste en explosions et incendies, IMT Mines Alès – Institut Mines-Télécom