Face à la crise écologique, les scientifiques passent à l'action

[Série 1/4] Vous lisez l’enquête « Crise écologique : la révolte des scientifiques ». Pour ne pas rater le prochain épisode, abonnez-vous à notre lettre d’info.


Blouse blanche et menottes aux poignets. En novembre dernier, une douzaine de chercheurs ont été placés en détention en Allemagne. Leur délit ? S’être collés avec de la glu à des automobiles de luxe. « C’est ma responsabilité, en tant que scientifique et en tant que citoyen, de me lever contre l’inaction [climatique], non seulement avec des mots, mais aussi avec des actions », justifiait l’astrophysicien Jérôme Guilet, l’un des interpellés.

Depuis l’appel à la rébellion lancé par plus de 1 000 scientifiques, la révolte gronde dans les labos. Tribunes dans les médias, blocages, manifestations, soutiens à des activistes lors de procès… « On est de plus en plus nombreux à sauter le pas, témoigne Kévin Jean, épidémiologiste et membre du collectif Scientifiques en rébellion. Ça fait des années que les chercheurs sonnent l’alerte, publient des rapports, font de la pédagogie… mais rien n’y fait. On veut donc tenter quelque chose de nouveau. »

Plus habitué aux colloques feutrés qu’à l’arène médiatique, le monde de la recherche fait-il sa révolution ? « L’engagement des scientifiques n’est pas récent », rappelle Nathalie Jas, historienne des sciences au sein de l’Inrae. Tout au long du XXe siècle, ingénieurs, chercheurs et experts ont pris position dans le débat public.

« En France, des scientifiques ont alerté sur les pesticides, dès les années 1950, note Mme Jas. Le livre de Rachel Carson, « Printemps silencieux », a été traduit par Roger Heim, alors président de l’Académie des sciences, et il a suscité une vive controverse dans le monde académique. » En 1975, 400 physiciens ont mis publiquement en cause le programme nucléaire français, dans un « appel », finalement signé par plus de 4 000 chercheurs.

« Il nous faut agir »

Entre 1970 et 1975, le groupe et le journal Survivre et vivre a fait de l’écologie son cheval de bataille : « La lutte pour la survie de l’espèce humaine, et même de la vie tout court, menacée par le déséquilibre écologique croissant causé par une utilisation indiscriminée de la science et de la technologie et par des mécanismes sociaux suicidaires, et menacée également par des conflits militaires liés à la prolifération des appareils militaires et des industries d’armement », selon l’un des fondateurs, le mathématicien Alexandre Grothendieck. Certains de ses membres sont allés jusqu’à déserter le monde académique.

« Il y a aussi eu de nombreux actes moins visibles, comme le fait de fournir des…

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Auteur: Lorène Lavocat Reporterre