Face à la haine en ligne, « l'État a confié la gestion de la liberté d'expression aux plateformes capitalistes »

Depuis l’attentat de Conflans, le gouvernement cherche à relancer la loi « Avia » (du nom de la députée LREM auteure du projet de loi, Lætitia Avia), contre les contenus haineux et terroristes sur internet, qui a été censurée en juin par le Conseil constitutionnel. La Quadrature du net s’est vivement opposée à cette loi. Pourquoi ?

Arthur Messaud : La loi Avia avait deux jambes. Celle de l’antiterrorisme n’était pas dans le projet initial de Lætitia Avia, elle a été ajoutée au dernier moment par le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner à l’époque. Ce volet prévoyait que la police puisse demander aux hébergeurs de retirer un contenu qu’elle considère terroriste, et si les hébergeurs ne réagissent pas dans un délai d’une heure, la police pouvait demander aux fournisseurs d’accès à Internet (FAI) de fermer le site. Cette disposition existe en fait depuis la loi antiterroriste de 2014, mais le délai était alors de 24 heures.

En 2017, cette disposition a été utilisée contre des sites du réseau alternatif Indymedia. La police leur avait demandé d’enlever quatre articles. Au final, les articles ont été remis en ligne car un juge a été saisi. Celui-ci a estimé, un an et demi plus tard, que la police avait abusé de ses pouvoirs en demandant la suppression de ces articles. Pour Indymédia, le fait d’avoir un délai de 24 heures leur avait permis de retirer les articles sans que l’ensemble des sites soit bloqué. Si le délai était réduit à une heure, ce qui est prévu dans la loi Avia, pour peu que la police envoie sa demande tôt le matin, la nuit ou le week-end, Indymedia n’aurait pas pu y répondre dans les temps. La police aurait alors été en droit d’exiger qu’Orange, SFR ou un autre FAI censure tout Indymedia. Ensuite, il faut plus d’un an pour qu’une démarche judiciaire aboutisse et permette de remettre en ligne le site. Pour nous, le but de raccourcir ce délai de 24h à une…

Auteur: Rachel Knaebel
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