Face à l'extrême droite et à sa violence : « Les réponses viennent avant tout de la société civile »

Basta !  : Vous avez étudié la réponse de l’État aux droites radicales depuis les années 1950. La question se posait déjà alors ?

Bénédicte Laumond : Aux élections de 1956, le parti poujadiste, l’Union de la défense des commerçants et des artisans, qui est une formation partisane radicale de droite, fait son entrée à l’Assemblée nationale. Un front républicain se forme déjà à l’initiative des partis de gouvernement, particulièrement de la gauche et du centre. La tactique consiste à ostraciser des partis considérés radicaux de droite, avec une volonté de les exclure parce qu’ils se réclament d’une idéologie qui a été particulièrement meurtrière les décennies précédentes. L’idée est alors présente chez de nombreux acteurs politiques qu’il faut se prémunir de ce type d’idéologie.

Ensuite, des groupes qui ne sont pas des partis, mais souvent des associations, ont fait l’objet de dissolutions. L’outil de la dissolution a été utilisé régulièrement ces soixante-dix dernières années en France. Dans les années 1950, des associations qui se réclament d’une idéologie nationaliste, autoritaire et fondamentalement anticommuniste, sont dissoutes. Il y a un jeu du chat et de la souris de reformation des groupes dissous. Se pose donc la question de l’efficacité de cet outil.

Quelle a été la réaction de l’État, du gouvernement, quand est né le Front national ? Est-ce qu’il a été discuté de son interdiction ?

Le Front national (FN) se créé au début des années 1970. Mais il a connu une traversé du désert jusque dans les années 1980. En France, on est dans un schéma où tant que la formation politique en question ne fait pas de vague, on ne va surtout pas chercher à la dissoudre. Dans les années 1970, le Front national a des résultats très bas, souvent en dessous de 1 %. Ça n’interpelle pas grand monde, même si la décennie est marquée par des violences racistes importantes. Une partie de la société civile – des groupes antifascistes, des associations antiracistes, des personnes syndiquées – s’organisent alors pour protester contre les crimes et les agressions racistes qui se multiplient. Ces agressions ne relèvent pas nécessairement et directement de la responsabilité du Front national mais on sait qu’il y a une porosité en termes de militantisme dans ce domaine. Si réaction il y a alors, elle vient avant tout de la société civile. En démocratie, la droite radicale n’est pas seulement régulée par l’État, elle l’est aussi par la…

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Auteur: Rachel Knaebel