Face à un Ordre des médecins jugé rétrograde, opaque et corporatiste, des praticiens entrent en dissidence

« Ils se targuent de dire qu’ils sont les représentants de la profession, alors qu’ils ne sont pas représentatifs. Ce sont surtout des gens très conservateurs. » Thomas Jégot, médecin généraliste trentenaire en Ariège, fait partie d’un groupe d’une dizaine de confrères ariégeois et de Loire-Atlantique en conflit avec l’Ordre des médecins. C’est l’organisme privé chargé depuis 1945 de l’organisation de sa profession. L’Ordre des médecins n’est pas un un syndicat. Tous les médecins, généralistes et spécialistes, hospitaliers comme libéraux, ont l’obligation d’y adhérer, et de s’acquitter d’une cotisation annuelle.

Cette cotisation, des médecins refusent depuis deux ans de la payer. Ils et elles ne le font pas pour l’argent, mais pour protester contre ce qu’est l’Ordre à leurs yeux : une organisation qui prend des positons politiques réactionnaires à l’encontre de l’intérêt des patients ; un organisme qui ne prend pas assez au sérieux les plaintes contre les médecins, même pour agressions sexuelles ; et qui, en plus, gère très mal la manne financière (85 millions d’euros de budget annuel) que représentent les cotisations des praticiens.

Les médecins récalcitrants vont bientôt se retrouver sur les bancs du tribunal. Attaqués par l’ordre pour le non-paiement de la cotisation, quatre médecins nantais passent en procès le 16 septembre, six en Ariège en octobre. D’autres procédures sont en cours.

« Une structure inutile »

« Quand je me suis installée dans les années 1980, avec quelques médecins, nous avions déjà lancé un mouvement, à Nantes, pour refuser de cotiser. Nous avons alors été condamnés à payer, mais ensuite on traînait des pieds pour le faire, témoigne Marie Kayser, médecin généraliste retraitée, adhérente au Syndicat de la médecine générale (SMG). Elle est l’une des praticiennes qui sera jugées dans quelques jours. Cette fois, c’est le rapport de la Cour des comptes de 2019 qui nous a remotivés à dénoncer l’ordre et à refuser d’alimenter une structure malfaisante et inutile. Ce rapport décrit des choses que nous dénonçons depuis des décennies. »

La Cour des comptes a contrôlé le Conseil national de l’Ordre des médecins il y a quelques années, ainsi que 46 conseils départementaux (sur 101) et les 24 conseils régionaux de l’Ordre. Les conclusions de son rapport de décembre 2019 sont accablantes.

Le rôle officiel de l’Ordre est « de veiller au respect des principes de moralité, probité,…

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Auteur: Rachel Knaebel