Acrimed : On a beaucoup parlé de la suspension des comptes Twitter et Facebook de Trump suite à l’attaque du Capitole par ses partisans en janvier. Pour les commentateurs, cela pose la question du pouvoir de censure des grandes plateformes. Que vous inspirent ces débats ?
Quadrature du Net : La censure du compte de Trump est un cas très particulier. Elle a le mérite de rappeler qu’il ne faut pas attendre des grandes plateformes qu’elles soient les garantes de la liberté d’expression ou de la démocratie. Facebook ou Twitter sont certes devenus des lieux de débat, y compris politiques, mais ce sont avant tout des entreprises privées. Leur modèle économique, leur organisation est entièrement orientée vers le gain financier et les revenus publicitaires – qui représentent jusqu’à 95% du chiffre d’affaires dans le cas de Facebook. Il s’agit donc, pour elles, d’organiser la visibilité des publications de sorte à inciter les utilisateurs à rester ou à revenir. Ce qui est totalement incompatible avec ce que pourrait être un outil de débat d’intérêt public. Ces plateformes sont des espaces privés, elles ne répondent à personne ou presque et suppriment régulièrement des comptes, notamment de militants politiques.
La censure du compte Twitter de Trump est cependant un sujet tout à fait secondaire en matière de libertés sur internet, en comparaison à d’autres sujets comme le règlement « anti-terroriste », en cours d’adoption dans l’Union européenne. Les médias sont tellement frileux de se frotter à des sujets un tout petit peu compliqués… Ils préfèrent se jeter à corps perdu dans des débats faciles – et souvent inintéressants – comme c’est le cas pour la suspension du compte de Trump. Mais lorsqu’il s’agit des libertés des citoyens, avec des vrais textes qui ont des conséquences pour toutes et tous, c’est la démission totale. On a été parmi les rares à parler du texte règlement « anti-terroriste » qui pose de graves problèmes pour les libertés, pendant que les commentateurs étaient occupés à disserter sur Trump. Que son compte soit censuré par Twitter ou Facebook n’a, au fond, pas grande importance. Il n’y a pas de liberté d’expression à sauver sur Twitter et Facebook. Ces plateformes sont faites pour organiser l’expression à des fins commerciales. Ce qui ne veut pas dire qu’il n’y a pas d’enjeux à leur faire rendre des comptes.
Il est vrai qu’on a très peu entendu parler de ce règlement anti-terroriste. Pourriez-vous nous en dire deux…
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Auteur: Frédéric Lemaire, La Quadrature du Net, Mathias Reymond, Pauline Perrenot Acrimed