Facebook : System of a Down

Je republie ici, pour archivage, la tribune publiée le 6 Octobre 2021 sur le site Libération : « Facebook en panne, Zuckerberg en peine ». Ce texte est complété par le lien vers une rapide entrevue sur France Info datée du même jour. _______________________

Facebook est en panne. Et avec lui Instagram, Messenger et WhatsApp. Une erreur humaine qui a eu lieu pendant « une opération de maintenance de routine ». Une erreur, une panne et pendant 7 heures, 2,8 milliards d’utilisateurs Facebook, 2 milliards d’utilisateurs WhatsApp, 1,3 milliards d’utilisateurs de Messenger et 1,2 milliards d’utilisateurs Instagram sont privés … de quoi d’ailleurs ?

Une « infrastructure sociale » est en panne. C’est cela que Zuckerberg, selon ses propres termes, voulait faire de sa firme. Il est compliqué de lui contester ce succès. Lorsque cette infrastructure sociale majeure tombe, une partie tout sauf négligeable du monde tel que nous le connaissons et l’habitons, se fige. Comme lors d’une grève dans un service public majeur. On observe d’ailleurs que lorsque les gens viennent ailleurs se plaindre, se moquer ou s’énerver de cette panne (sur Twitter surtout), ou tenter de la contourner (sur Telegram ou Signal), ils en parlent presque comme d’une grève.

Un service est en panne. L’occasion de mesurer ce qu’il nous rendait vraiment comme service. Et de revenir au problème et à la question fondamentale de Facebook et des autres : ils sont une partie aujourd’hui déterminante de notre espace public commun, une place centrale, une centralité exacerbée. Mais ils n’ont rien de public. Ni dans leur gouvernance, ni dans leurs objectifs, ni bien sûr dans leur modèle économique.

Les conversations sont en panne. C’est de cette panne qu’il s’agit. Le web des origines a toujours été celui de ces conversations entre des gens qui ne parlaient, ni ne « se parlaient » pas avant mais qui restèrent longtemps, dans leur nombre, une forme de marge, de périphérie, mais de périphérie reliée. Ces conversations ont grossi en volume, en intensité, en nombre, en dynamique. La conversation publique, ce « café du commerce » hier si méprisé par une éditocratie qui n’envisage plus aujourd’hui de parler d’autre chose que de ce qui s’y dit en bord de zinc, cette conversation publique est tout entière captée, potentialisée, mais modelée et fabriquée aussi, par Facebook.

Et l’ensemble des trois autres services tombés (Instagram, Messenger et Whatsapp) sont l’autre conversation : la conversation privée, intime, celle qui rythme nos quotidiens, le covoiturage de nos…

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Auteur: olivierertzscheid Olivier Ertzscheid