Faire date autrement

La facilité avec laquelle nous recodons les événements pour en extraire des clivages factices est consubstantielle au mouvement qui abolit ou suspend la politique – le « faire politique ». La sanglante séquence initiée le 7 octobre n’échappe pas à ce fait. Dans cet excellent texte, Catherine Hass, autrice de Aujourd’hui la guerre et de République et Châtiment, s’inscrit en faux vis-à-vis de l’injonction à camper d’un côté ou de l’autre. Ce n’est pas qu’elle refuse naïvement toute division. Elle refuse cependant toute division naïve. Elle fait en sorte de la rendre éminemment politique. Car la politique commence d’abord lorsque l’on sort des pièges et des cycles infinis tendus par la logique de terreur.

1. Quelques semaines après le 11 septembre 2001, Jacques Derrida, alors à New York, est interrogé sur l’évènement et analyse, dans Auto-immunités, suicide réels et symboliques, son statut de « major event » permettant de le qualifier comme tel. Il le fait dit-il, « en essayant d’appeler, par-delà la commotion et la compassion la plus sincère, à des questions, à une “pensée” (entre autres choses, une vraie pensée politique). » Derrida analyse ainsi nombre des difficultés inhérentes à la pensée de l’évènement, qu’il s’agisse de sa nomination, du concept de terrorisme, des difficultés à « distinguer entre le fait supposé brut, l’“impression” et l’interprétation », du caractère toujours « informé » de nos impressions, ou encore, de la façon dont le 11-Septembre a touché « l’inconscient géopolitique de tous les vivants ». Les multiples faces de la pensée de l’évènement identifiées par Derrida peuvent être lues comme un appui pour penser la séquence ouverte par le 7 octobre 2023 tant l’abîme de sens et l’impasse que cristallise cette date se sont révélés obscurs, exaltés et mortifères. Le début de l’entretien porte sur l’…

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Auteur: dev