Faut-il vraiment “rester soi-même”?

« Sois toi-même ! » Nous sommes certainement nombreux à prononcer ce genre de phrases de temps à autres. Qu’elle soit adressée à un ami en difficulté ou à notre propre reflet dans le miroir, cette formule aux allures d’incantation auto-réalisatrice est très présente dans notre quotidien. Abondamment employée dans le développement personnel, le monde du travail ou les slogans publicitaires, comme ce fut le cas dans une campagnes de recrutement de l’armée de terre, l’injonction à devenir « soi-même » constitue l’illustration d’un des grands récits capitalistes : la quête d’authenticité individuelle. Retour sur un énoncé répandu.

« Dans un monde aujourd’hui insupportable et qui, bientôt, le sera bien plus encore, il est temps pour chacun de se prendre en main, sans attendre indéfiniment des solutions miraculeuses. Il ne s’agit pas de résistance, ni de résilience. Mais de devenir soi. » Cette citation figure en quatrième de couverture du livre de Jacques Attali, Devenir soi (Ed. Fayard, poche 2015). L’ouvrage nous présente le très libéral économiste, chef d’entreprise et ancien conseiller présidentiel dans son nouveau costume de coach de vie. Après avoir dressé une liste d’artistes, entrepreneurs, self-made men qui, selon lui, sont devenus « eux-mêmes » sans l’aide de personne, Attali nous donne les clés de la réussite : se respecter, aller de l’avant, avoir une image positive de soi et autres poncifs. Le tout mâtiné de bouddhisme à la sauce ultralibérale. Pour notre énarque polytechnicien, le problème n’est pas d’aller mal, d’être précaire ou de subir des injustices sociales. Le problème est de ne rien faire pour essayer de s’en sortir. Attali vilipende ainsi ceux qu’il nomme les « résignés-réclamants », incapables de « choisir leur vie » et « consommateurs égoïstes de services publics qu’ils ne songent plus eux-mêmes à rendre aux…

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Auteur: Maxime Devars