Fin de vie : « Ce projet de loi travestit la réalité »

« Avec ce texte, on regarde la mort en face ». Ces mots sont ceux du Président dans l’entretien accordé à « La Croix » et « Libération » le 7 mars dernier pour présenter le projet de loi qui ouvre la possibilité d’une « aide à mourir » et qu’il qualifie, à deux reprises, de « loi fraternité ». Mais que signifient ces mots ? Est-ce à dire que les soignants engagés au quotidien dans le soin des malades en fin de vie occultaient cette réalité et la fuyaient, ou qu’un tel regard serait la condition d’un accompagnement fraternel ?

Les situations visées par ce projet de loi nous placent au cœur de la finitude des vies humaines, vulnérables et mortelles. Ce sont ces situations – et nous en avons tous en tête – où la maladie est incurable, le pronostic vital engagé à plus ou moins brève échéance, et où la souffrance fait son œuvre de destruction, altérant une à une toutes les capacités et les relations à soi et à autrui de celui qui les subit.

Ces situations nous appellent assurément à la fraternité, et à une humanité capable de faire face à cette réalité dans sa complexité, ses incertitudes et les ambivalences qu’elles suscitent. Mais à quoi cette fraternité et cette humanité nous obligent-elles ? L’intolérable, l’insupportable de la souffrance et le terrible qui s’y expérimentent, pour le malade comme pour les proches impuissants, ne peut que susciter ce cri : « C’est assez ! C’en est trop ! ». Mais à quoi ce refus et cette indignation nous convoquent-ils ?

Vaincre la révolte

La réflexion de Paul Ricœur sur le mal, la souffrance, ou encore le tragique de la vie humaine dont la liberté ne s’exerce jamais que sur fond de contraintes multiples, peut nous aider à comprendre ce qui y est en jeu. Son étude du tragique grec nous montre que la grandeur de l’homme est d’être « constitué en contre-pôle du malheur qui fond sur lui » [1]. Prométhée est de ces…

La suite est à lire sur: www.la-croix.com
Auteur: Marie-Dominique Trébuchet, Anne-Solen Kerdraon