Fin du zéro Covid en Chine : conséquences et risques pour une population peu immunisée

La Chine est le seul grand pays qui, jusqu’à récemment, a continué à appliquer une stratégie « zéro Covid ». Depuis le 7 décembre dernier, elle fait désormais machine arrière. D’autres pays, dont l’Australie, la Nouvelle-Zélande et Singapour, avaient également cherché à éliminer totalement le Covid de leur territoire en début de pandémie, mais tous avaient finalement abandonné cette approche. Les coûts sociaux et économiques croissants étaient devenus insoutenables, tout comme les efforts exigés… face à la prise de conscience que l’élimination locale du Covid ne pouvait être que transitoire.

En République populaire de Chine, la stratégie sanitaire qui s’appuyait sur des mesures comme les tests PCR de masse, la fermeture de villes et de provinces entières ou la mise en quarantaine de toute personne susceptible d’avoir été exposée au virus, est à son tour devenue impossible à tenir.

La dureté et souvent l’application arbitraire du zéro Covid a alimenté une fatigue et un ressentiment croissant au sein de la population, qui se sont traduits récemment par de grandes manifestations publiques.

Les restrictions ont également montré leurs limites face à Omicron : moins sévère mais plus transmissible, ce variant a une période d’incubation plus courte que les précédentes lignées du SARS-CoV-2, et il contourne largement la protection contre l’infection conférée par les vaccins originaux.

Il est compréhensible que les autorités chinoises finissent maintenant par prendre des mesures pour assouplir les restrictions… Cependant, la sortie d’une politique zéro Covid a été douloureuse pour tous les pays qui l’ont faite. Et la Chine ne fera pas exception, elle est même confrontée à des défis uniques dans cette transition.

Une faible immunité de la population chinoise

Le contrôle strict de la Chine sur sa population lui a permis d’empêcher une transmission générale du Covid à tout son (immense) territoire depuis début de 2020 – ce qui est un tour de force. Les près de 10 millions de cas signalés à l’Organisation mondiale de la santé ces trois dernières années (les chiffres diffèrent selon les sources) ne représentent qu’une infime partie de ses 1,412 milliard d’habitants. Mais cette réussite a pour conséquence malheureuse que sa population n’a acquis qu’une immunité minimale contre le Covid par exposition au virus.

Voyageurs dans une gare à Beijing portant le masque

Soumise à une politique zéro Covid stricte, la population chinoise a été moins exposée au virus.
EPA-EFE/WU HAO

Qu’en est-il de l’immunité vaccinale ? Les taux de vaccination en Chine sont comparables à ceux des pays occidentaux… Mais ils montrent une caractéristique inhabituelle : ils diminuent avec l’âge. Alors qu’elles sont les plus exposées au risque de formes graves du Covid, les personnes âgées sont ainsi le groupe démographique le moins vacciné avec seulement 40 % des personnes de plus de 80 ans ayant reçu trois doses.

Autre point : l’efficacité des vaccins contre la transmission a été sévèrement mise à l’épreuve, surtout depuis qu’Omicron a commencé à se propager fin 2021. Toutefois, la protection contre les formes les plus sévères et la mort procurée par les vaccins à ARNm utilisés par les pays occidentaux restait, elle, solide.

Mais la Chine a utilisé des vaccins différents de sa conception, dits « inactivés », fabriqués par les sociétés Sinovac et Sinopharm. Ce type de vaccin est basé sur des agents pathogènes (en l’occurrence le SARS-CoV-2, le virus responsable du Covid-19) qui sont tués, ou inactivés, avant leur inoculation. Si ces vaccins sont généralement sûrs, ils ont tendance à susciter des réponses immunitaires plus faibles que les nouvelles technologies – telles celles employées dans les vaccins à ARNm (Pfizer et Moderna) ou à vecteur adénoviral (AstraZeneca et Johnson & Johnson).

Les performances des vaccins chinois ont ainsi été mitigées. Alors que deux doses du vaccin Sinovac semblent avoir permis de réduire les décès de 86 % au Chili, les résultats à Singapour suggèrent une moins bonne protection contre les formes sévères que leurs équivalents à ARNm.

Certes, le variant Omicron (via ses nombreux sous-variants), dominant au niveau mondial, est associé à une gravité de la maladie et un taux de…

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Auteur: Francois Balloux, Chair Professor, Computational Biology, UCL