Flambée des prix : « Les États doivent faire des stocks alimentaires »

Morgan Ody, paysanne dans le Morbihan, est membre de la Confédération paysanne et coordinatrice générale de la Via Campesina. Ce mouvement international rassemble des petits et moyens paysans, des communautés indigènes de tous les continents, ainsi que des travailleurs agricoles.


Reporterre — Ce samedi 11 juin, vous avez organisé une manifestation contre l’Organisation mondiale du commerce (OMC), dont l’organe de décision suprême se réunit à Genève du 13 au 15 juin. Vous défendez notamment le droit des pays à constituer des stocks alimentaires publics. En quoi cela consiste-t-il ?

Morgan Ody — Un des rôles des États, depuis leur création, est de faire des stocks afin d’éviter les crises alimentaires. Et un certain nombre continue à le faire. Les États asiatiques, par exemple, ont tous des politiques de stocks publics très importants. L’Inde est ainsi le champion du stockage public alimentaire.

Or, ces politiques se sont trouvées sous le feu des critiques néolibérales, et donc de l’Union européenne, des États-Unis ou encore de pays comme le Canada ou l’Australie. Ces derniers ne veulent pas des stocks publics, car ils estiment que cela déforme le marché.

Et effectivement, c’est l’un des buts du stockage public que de réguler le marché, afin que les prix soient stables. Les Indiens, par exemple, utilisent leurs stocks publics pour assurer un niveau de revenus minimum pour leurs agriculteurs, ainsi qu’un prix d’achat raisonnable pour la population en cas de forte instabilité des prix.

À la Via Campesina, nous pensons que constituer des stocks alimentaires publics est légitime et nécessaire. C’est indispensable pour assurer la sécurité alimentaire des populations.

Cela est d’autant plus nécessaire que nous faisons actuellement face à de multiples crises : la crise climatique, la pandémie de Covid-19 — qui a profondément déstructuré le commerce international — et maintenant la guerre en Ukraine. Ainsi, en raison de phénomènes spéculatifs, la tonne de blé se vend à plus de 400 dollars, bien au-dessus des coûts de production que nous avons en France, par exemple.



Ces politiques de stock public alimentaire sont-elles compatibles avec les règles de l’OMC ?

Il existe un cadre dans l’OMC pour le stockage public alimentaire depuis 2013. Mais ses règles sont quasiment impossibles à respecter. Ainsi, certains États, comme l’Inde, sont sous la menace permanente d’une injonction de l’organe de règlement des différends de l’OMC. Cette semaine, à Genève,…

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Auteur: Reporterre