Folklore, révolution et carnaval

«Le portrait de Che Guevara est en évidence dans le local de la confraternité de Verbicaro (province de Cosenza). Avant d’entamer leur sanglante promenade, les vattiente vont l’effleurer du doigt et font le signe de croix ». Voilà une tradition citée par le réalisateur et essayiste Alessi Dell’ Umbria qui déroutera l’orthodoxe mais ravira le folkloriste. Ces flagellants, les vattiente (littéralement, les battants), s’administrent des coups avec du verre pilé et répandent le sang dans la cité calabraise, traditionnellement rouge. Son maire dans les années 1970 était militant de Lotta Continua. Ce n’est pas sans rappeler le maire actuel de Cadix, surnommé Kichi, « carnavaleux » et élu du mouvement Podemos.

Le Gruppo Operaio ‘E Zezi, (‘E zezi en référence à ‘E zeza, la scène carnavalesque originaire de Naples) — depuis sa création dans les années 1960 à Pomigliano d’Arco, à une dizaine de kilomètres au sud-est de Naples, par des ouvriers de l’usine automobile Alfasud, puis rejoint par des étudiants, des artisans et des musiciens professionnel —, commente les fluctations de la condition ouvrière : le travail à la chaîne (Tammuriata dell’Alfasud), le travail au noir (Pummarola Black), le chômage, et en 1975, rappelle Dell’Umbria, il crée une tarentelle en soutien à une grève des ouvriers qui ramassent la tomate, la San Marzano. Le groupe né dans la rue opérait lors de meeting politiques, déambulation carnavalesque ou concerts. À l’époque déjà se posa la question de la transformation de la chanson populaire et familiale en tubes. L’uniformisation galopait, l’exil du sud s’amplifiait.

Antonio Gramsci en prison écrivait que le folklore avait été vu de manière pittoresque mais non reconnu comme « conception du monde et de la vie » implicite, alors que, inscrit dans les gestes de la vie et de la fête, au plus loin de l’apprentissage cultivé des classes éduquées, il se fait en…

Carnaval de la Plaine, 2019 © baroug

Auteur : Christophe Goby
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