Forêts en péril : comment l’imagerie et la big data peuvent contribuer à les protéger ?

Avec plus de 65 000 hectares de végétation partis en fumée, l’été 2022 aura été celui des incendies et s’inscrit parmi les pires de ces dernières décennies, avec 2003 et 2019.

Ces feux, qui ne se limitent plus à la seule zone méditerranéenne, provoquent leur lot de victimes au sein de la population et chez les pompiers, de destructions, de pertes économiques et environnementales. Des assauts répétés du climat qui engendrent aussi une dégradation progressive de la santé des arbres.

Au fil du siècle dernier, des outils de diagnostic ont émergé pour suivre de près l’état des forêts. Aujourd’hui, les progrès de l’imagerie offrent un potentiel immense.

Forêts fragiles, la lente prise de conscience

Dès le début du XXe siècle, les forestiers constatent l’émergence de nouveaux pathogènes des arbres – oïdium du chêne, chancre du châtaignier, dendroctone… Mais il faudra attendre 1958 pour que soit créé l’inventaire forestier national, institut destiné à récolter des statistiques sur les forêts.

Ce n’est que dans les années 1960 que se mettent en place les premiers observatoires puis les premiers suivis de l’état des forêts métropolitaines. La sécheresse de 1976, la mortalité des chênes de la forêt de Tronçais ou encore les dépérissements des résineux dans l’Est entraînent la création d’un département santé des forêts (DSF) au sein du ministère de l’Agriculture en 1989. Est alors établi un suivi de l’état d’environ 12 000 arbres sur 600 placettes permanentes installées de façon systématique tous les 16 km sur l’ensemble du territoire métropolitain.

Chacun de ces arbres est scruté à la loupe, pour repérer d’une part les mortalités de branches pour toutes les essences et d’autre part, le manque de ramifications pour les feuillus et le déficit d’aiguilles pour les résineux. Les observations menées depuis la mise en place de ce dispositif et sur des placettes non permanentes dressent un tableau inquiétant de la santé de nos forêts. Si moins de 1 % des arbres suivis meurent chaque année, la mortalité est en constante progression depuis 2010.

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Dans le houppier, c’est-à-dire la partie sommitale des arbres, le constat est encore plus net : la perte de feuilles – dite déficit foliaire – y a crû de manière constante depuis le début des mesures en 1997. Pour la mortalité comme le déficit foliaire, pratiquement toutes les espèces d’arbres sont touchées.

Le « dépérissement forestier » est évoqué lorsque ce phénomène de dégradation affecte un peuplement entier, voire des massifs. Généralement, il implique plusieurs facteurs environnementaux, qui peuvent se succéder ou agir de concert.

pompier face au feu

Plus les forêts prennent feu, plus le risque d’incendie augmente, le carbone relâché dans l’atmosphère renforçant les risques de canicule, de sécheresse et d’incendie.
Philippe Lopez/AFP

Cercle vicieux et course contre la montre

On distingue des facteurs prédisposants (la nature des sols, l’identité et l’origine génétique des arbres en place, la densité du peuplement et/ou considérées), des facteurs déclenchants (des événements de sécheresse et de canicule sévères ou répétés, des défoliations successives à la suite d’attaques de phytophages) induisant une perte de vigueur des peuplements, et enfin des facteurs aggravants (des ravageurs des parties aériennes ou racinaires) contribuant à la mort des arbres affaiblis.

Connus de longue date, ces phénomènes se manifestent actuellement avec une intensité et une ampleur sans précédent. Or les modélisations n’incitent pas à l’optimisme : le climat continuera de se dégrader, mettant à mal la capacité de nombreuses essences d’arbres à se maintenir et adapter leur répartition naturellement.

Cela menace les multiples services que nous offrent les forêts : une forêt qui dépérit stocke de moins en moins de carbone et devient plus sensible au feu.

Le carbone étant relargué sous forme de CO2 dans l’atmosphère lors des incendies, cela renforce l’intensité, la durée et la fréquence des sécheresses et des canicules, et donc le risque de feu. Un cercle…

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Auteur: Frédéric Archaux, Chercheur, Inrae