France Télécom : « les entreprises et les administrations publiques n’ont pas tiré la leçon »

Ce vendredi, la Cour d’appel rendra son jugement suite au procès des responsables de France Télécom (ex-Orange). Le 20 décembre 2019, l’entreprise avait été condamnée pour trois années de « harcèlement moral institutionnel » ayant engendré de la souffrance au travail et poussé plusieurs salariés au suicide. Six dirigeants reconnus coupables, dont l’ex-PDG Didier Lombard, ont fait appel et été jugés mi-mai 2022. Dans l’attente de ce verdict imminent, entretien avec Michel Lallier, président et co-fondateur de l’association ASD-Pro (Aide aux victimes et aux organisations confrontées aux Suicides et Dépressions professionnels) qui s’est constituée partie civile au procès en appel des dirigeants de France Telecom. Cet expert syndical santé raconte tout le chemin qu’il reste à faire pour une véritable reconnaissance de la souffrance psychique liée au travail. 

 

Le procès de France Télécom débuté en 2019 avait porté une lumière crue sur les conséquences d’une organisation du travail délétère. Constatez-vous, depuis lors, l’instauration de garde-fous dans les modèles de restructuration et de management mis en place ? Ou au contraire, assiste-t-on à davantage de brutalité ?

 

Malheureusement, les entreprises et les administrations publiques n’ont pas tiré la leçon de ce procès. Les restructurations des grandes entreprises, les plans de suppression d’emploi successifs qui se déroulent dans la fonction publique, sont menées tambour battant, à peu près dans le même style qu’à France Telecom. Or, les mêmes causes produisent les mêmes effets. Le nombre de personnes en souffrance au travail et de suicides en lien avec le travail ne cessent d’augmenter. Une étude de Santé Publique France, publiée fin 2021, passe au crible près de 1300 suicides : elle conclut que quasiment 10 % des suicides sont liés au travail.

Et ces données sont en hausse constante. Même si elles ne sont pas toujours faciles à mesurer. Prenez le dernier rapport annuel de la caisse nationale d’Assurance maladie : en 2020, elle a reconnu plus de 1 400 maladies psychiques en lien avec le travail*. Si on remonte dix ans en arrière, il devait y en avoir 50… La souffrance au travail augmente. Le procès France Telecom n’a pas mis un frein à tout ça.

 

Le principal combat de votre association est la reconnaissance de la souffrance psychique – et des actes qui en découlent, comme les tentatives de suicides -, en maladie professionnelle et en accidents du travail. Pourquoi cette reconnaissance…

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Auteur: Maïa Courtois