Basta! : En quoi s’intéresser aux contrôles des chômeurs permet de comprendre les enjeux politiques de gestion du chômage ?
Jean-Marie Pillon : Depuis l’aide au chômeur au début du 20e siècle, il y a toujours eu des dispositifs pour vérifier que les personnes qui recevaient des aides financières n’étaient pas des « mauvais pauvres », des oisifs. Pendant les Trente Glorieuses, il s’agissait de savoir si les chômeurs n’étaient pas des « travailleurs au noir » : s’ils bénéficiaient d’une aide alors qu’ils travailleraient par ailleurs. Dans les années 1980, on assiste à une individualisation du traitement du chômage : est-ce que la personne est « dynamique », engagée dans sa recherche de travail ?
Ce n’est plus une question globale d’offre et de demande sur le marché du travail, la responsabilité du chômeur lui-même est convoquée et aboutit à une intensification du suivi par l’ANPE [Agence nationale pour l’emploi, ancêtre de Pôle emploi puis France Travail, ndlr] et à une contractualisation des objectifs de recherche d’emploi. Cela aboutira au Plan d’aide au retour à l’emploi (Pare) en 2001, puis en 2005 au suivi mensuel personnalisé.
En 2008, suite à la fusion de l’ANPE et de l’Assedic [en charge des indemnisations chômage, ndlr] dans Pôle emploi, le même conseiller doit tout faire : indemniser, accompagner, contrôler. Forcément, cela ne marche pas parce que ce n’est pas le même métier. À partir de 2013, le contrôle des dossiers est alors confié à des équipes dédiées.
Luc Sigalo Santos : L’étude du contrôle des chômeurs révèle une volonté de reprise en main politique de l’état-major de Pôle emploi. Faire contrôler par des plateformes régionales arrimées à la direction nationale a été une façon de contourner les résistances du réseau. Au départ, les ex-ANPE ne voulaient pas devenir des « flics », comme ils disaient. Cela contrevenait à…
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Auteur: Ludovic Simbille