Spécialiste des forêts tropicales, Francis Hallé est connu internationalement pour être le co-inventeur du Radeau des cimes, une ingénieuse nacelle qui permet d’étudier la canopée des forêts. Luc Jacquet lui a consacré un film en 2013 Il était une forêt. Il a reçu Reporterre à Montpellier (Hérault), où il habite.
Reporterre — Qu’est-ce qui vous fascine le plus dans les arbres ?
Francis Hallé — Il y a dans leur rapport au temps quelque chose de fabuleux. Quand je regarde un arbre, aujourd’hui, je me dis que c’est un spectacle que j’aurais pu observer au Crétacé. Tout s’est métamorphosé autour. Les paysages se sont transformés, l’homme est apparu, des villes ont poussé, mais les arbres, eux, demeurent. Rien n’a changé depuis leurs origines, soit il y a plus de cent millions d’années. Ils sont immuables, quasi éternels. Grâce à eux, j’ai appris à voir le monde différemment. Quand je grimpe sur l’un d’entre eux et que je me perche à sa cime, l’horizon me semble plus vaste, je vois plus loin, je respire.
Je me souviens d’une rencontre avec un forestier aux États-Unis. Il m’avait montré un séquoia exceptionnel qu’il avait baptisé « le Parthénon ». L’arbre avait trois mille ans. Il était plus vieux que le berceau de notre démocratie. Il contenait dans sa durée de vie toute la civilisation gréco-romaine.
Comment est né votre attrait pour les arbres ?
Dès l’enfance. J’avais six ans pendant la Seconde Guerre mondiale et mes parents habitaient dans une petite maison en Seine-et-Marne. Ils possédaient un terrain d’un hectare avec une forêt. On se chauffait au bois. C’est à ce moment-là que j’ai commencé à fréquenter les arbres et que j’ai compris leur utilité. Ils étaient là sous mes yeux. Je passais ma journée à y grimper. Je débutais mon ascension par un jeune châtaignier. Il avait de grandes branches qui poussaient au ras-du-sol. C’était très pratique. Une fois arrivé en haut, je sautais sur un pin laricio pour monter encore plus haut jusqu’au sommet. Je me retrouvais à plus de vingt mètres du sol. C’est un souvenir inoubliable, j’avais le sentiment d’une grande liberté.
« Je crois que c’est le dessin qui m’a sauvé. Il exige une attention, un regard, de l’imagination. »
Quelle place donnez-vous à la beauté dans votre travail ?
Elle est essentielle. Et je constate que l’émerveillement, à mesure que les années passent, prend de plus en plus d’importance. J’en suis à prétendre que la beauté devrait…
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Auteur: Gaspard d’Allens (Reporterre) Reporterre