Frédéric Lordon : “Etre un intellectuel, c’est prendre parti pour ce qui déconcerte l’ordre social, se mettre du côté des forces de l’effraction, contre les intellectuels pour médias” Deuxième partie

A l’occasion de la sortie le 18 septembre dernier de l’ouvrage collectif sobrement intitulé “Police” aux éditions La Fabrique, on s’est dit qu’on avait là une très bonne occasion de s’entretenir avec l’économiste et philosophe Frédéric Lordon sur tout un tas de choses. La deuxième partie porte sur une réflexion autour du concept de “république” et du rôle des intellectuel(le)s, notamment lors de mouvements sociaux et de révoltes populaires. Par Selim Derkaoui et Nicolas Framont.

Tu expliques dans le livre “Police” que la “république” serait un “signifiant” qui relève de la “fiction”. Les personnalités politiques de la France insoumise, par exemple, convoque souvent dans leurs discours ou leurs textes la “république”, ou encore l’idée d’une “police républicaine”… Pour quelle raison est-ce, selon toi, une “fiction”, pourrais-tu développer ? 

C’est toujours le même problème avec les mots : il y a leur signification d’origine, et il y a ce qu’ils sont devenus avec le temps, par l’usage – l’écart est parfois abyssal. Rien ne garantit un mot contre ces dérives puisqu’il est en permanence resignifié dans et par la praxis. Alors se pose la question : que faire d’un signifiant d’abord enthousiasmant mais devenu problématique, voire pestilentiel ? Se résigner à l’abandonner ou faire le choix de le redresser ? Je ne crois pas qu’il y ait de réponse générale à cette question : il n’y a que des cas particuliers qui appellent à chaque fois un exercice de discernement. Par exemple « communisme ». Qu’est-ce qu’on fait avec « communisme » ? J’ai toujours eu beaucoup d’estime pour ceux qui, tel Alain Badiou, défient l’adversité générale et relèvent ce que tout le monde estime…

Crédit photo : Stéphane Burlot pour “Ballast”.

Auteur : Rédaction Frustration mag
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