Fusion nucléaire : « C'est hors sujet face à la crise climatique »

Yves Marignac est chef du pôle énergies nucléaire et fossiles de l’institut NégaWatt.


Reporterre — Des chercheurs californiens ont annoncé, le 13 septembre, une percée scientifique « majeure » dans le domaine de la fusion nucléaire. Une technologie qui, contrairement à la fission nucléaire, n’émet pas de déchets radioactifs. Est-ce une bonne nouvelle pour le climat ?

Yves Marignac — Non. Rien, dans les résultats scientifiques publiés le 13 septembre, ne permet de croire à la promesse d’un avenir alimenté par la fusion. Même s’il faut saluer la prouesse scientifique, elle reste absolument nulle et non avenue dans le débat sur la transition énergétique et la lutte contre le changement climatique.

Le principe de la fusion inertielle, mise en œuvre au sein de ce laboratoire californien, est d’utiliser des faisceaux laser pour exciter et comprimer des billes d’hydrogène, afin de déclencher la fusion. Ces résultats sont qualifiés de « percée » car pour la première fois, le rendement entre l’énergie injectée et l’énergie fournie est positif. Le ratio n’est pas phénoménal : 2,05 mégajoules injectés pour 3,15 mégajoules produits. L’énergie libérée par cette expérience pourrait faire chauffer entre 15 et 20 bouilloires.

La communication autour de ces résultats est un peu trompeuse. Pour faire fonctionner les faisceaux laser qui excitent les billes d’hydrogène, il faut consommer 300 mégajoules supplémentaires. Par ailleurs, on sait caler parfaitement les laser pour bombarder une bille d’hydrogène sur une journée. Dans un contexte d’exploitation industrielle, il faudrait multiplier cette fréquence par plusieurs milliers. On en est encore extrêmement loin.

Même si cette expérience était réellement une étape sur le chemin d’une maîtrise industrielle de cette forme de production d’énergie — ce qui n’est pas le cas —, cela ne change rien au fait qu’elle ne serait de toute manière pas mature avant de nombreuses dizaines d’années.

Certains parient pourtant sur la mise en place d’une filière industrielle de fusion nucléaire à l’horizon 2070…

C’est extrêmement optimiste. Cela fait vingt-cinq ans que je travaille sur les sujets de l’énergie. Quand j’ai commencé, on disait déjà que la fusion était pour dans cinquante ans. Les choses n’ont pas évolué depuis. Tout ce que la communauté de la fusion a su faire, c’est développer des expériences de laboratoire de plus en plus grosses et complexes, mais sans réellement franchir…

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Auteur: Hortense Chauvin Reporterre