Il y a dix ans, j’ai, pendant trois mois, partagé le quotidien des habitants de la Bande de Gaza. Lors de mon séjour, l’enclave, où ont été concentrés les Palestiniens expulsés en 1948 par Israël, était déjà sous blocus. En 2007, après avoir occupé et colonisé Gaza pendant quarante ans, l’occupant israélien a opté pour une autre stratégie, se contentant d’imposer un blocus terrestre et maritime pour isoler le territoire et sa population. Depuis, même lorsque Gaza ne fait pas la une des journaux, les Gazaouis sont enfermés et manquent de tout, les pêcheurs sont attaqués par la marine de guerre à l’intérieur des eaux territoriales palestiniennes, et des manifestants non-violents qui entendent se rapprocher des frontières sont abattus.
À l’été 2012, un rapport de l’ONU nous avait alertés : sans amélioration rapide des conditions de vie, l’endroit risquait de ne plus être humainement habitable avant 2020. De février à avril 2013, j’ai été enseignant de français à l’université Al-Aqsa, seule université publique de Gaza. En m’y rendant, je gardais à l’esprit les images des bombardements des années précédentes. Bâtiments éventrés, corps inertes au milieu des gravats, enfants brûlés au phosphore blanc. Du blocus, je n’avais qu’une connaissance théorique. Celle des huit heures d’électricité par jour, du taux de chômage à 50 % et des 80 % de la population qui dépendaient déjà de l’aide alimentaire.
Sur place, j’ai pu mesurer le resserrement du temps et de l’espace, dans un enclos de trente kilomètres de long pour dix kilomètres de large. Souvent je peinais à avancer dans les rues de Gaza, qui compte l’une des densités de population les plus élevées du monde. J’étais fréquemment abordé par des jeunes hommes. Ils voulaient que je leur décrive « la vie dehors », c’est-à-dire en dehors de l’enclos. Je sentais leur angoisse, la peur qu’en les parquant, Israël…
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