Gisèle Jourda : « Personne n'a intérêt à ce que l'on sache que les sols sont pollués »

C’est un poison discret distillé un peu partout en France : les sols pollués. De la simple station-service à l’imposante usine chimique en passant par les mines, ces sites ont souvent été fermés sans précaution ni dépollution. Notre riche passé industriel a laissé des traces toxiques bien difficiles à traiter aujourd’hui. Reporterre vous le raconte de trois façons : en se plongeant dans un quartier de Marseille au lourd passé industriel ; avec le bilan d’une démarche officielle qui voulait identifier les écoles polluées et au travers de cet entretien.


La pollution des sols en France est importante, sous-estimée et mal gérée : c’est en substance ce qu’a conclu un rapport sénatorial de septembre 2020, issu de la commission d’enquête sur « les problèmes sanitaires et écologiques liés aux pollutions des sols ». Il propose de créer un véritable droit de la protection des sols, afin d’enfin regarder en face les pollutions héritées de notre passé industriel. Gisèle Jourda, sénatrice (Parti socialiste) de l’Aude et rapporteuse de la commission, a répondu à Reporterre. Et fait le bilan un an après le rapport : malgré une forte mobilisation des sénateurs, la majorité de leurs propositions ont été rejetées par le gouvernement.

Reporterre — Comment vous êtes-vous intéressée à la problématique des sols pollués ?

Gisèle Jourda — Nous avons eu, en 2018, de fortes inondations dans l’Aude qui ont fait énormément de morts. Six rien que dans ma ville, Trèbes. Quelques jours après, une amie m’a appelée et m’a dit : « On a de la pollution chez nous, c’est comme du sucre glace sur tout le champ. » C’était de l’arsenic. Les inondations l’avaient ramené de Salsigne (Aude), où la vallée complète a été polluée par des terres toxiques, de l’ancienne mine d’or mais aussi des terres ramenées d’Australie et du Japon par l’ancien exploitant australien. Quelque temps après ce coup de fil, j’ai appris que des enfants touchés par cette pollution avaient des analyses d’urine avec des taux d’arsenic importants, parmi eux il y avait un nourrisson.

Leur suivi sanitaire a été scandaleux. Les familles avaient annoncé qu’elles feraient des analyses. L’Agence régionale de santé (ARS) a voulu les en dissuader. Elle disait qu’aucune étude ne prouvait que l’arsenic peut être dangereux pour un enfant, et qu’il ne fallait pas s’inquiéter. Les habitants ont quand même fait ces tests.

« Personne n’a intérêt à ce que l’on sache que les…

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Auteur: Marie Astier (Reporterre) Reporterre