Grand Paris Express : « Les accidents du travail sont invisibilisés »

Les grands chantiers ne détruisent pas que les espaces naturels et agricoles. La construction est l’un des secteurs où l’on constate le plus d’accidents du travail, et souvent les plus graves. C’est ce qu’ont rappelé récemment plusieurs accidents mortels sur les chantiers du Grand Paris Express. C’est aussi ce que nous apprennent les statistiques publiques. En 2018, au moins un mort au travail sur cinq travaillait dans le secteur du bâtiment et travaux publics (BTP).

Malgré un « important dispositif de mesures de prévention des risques, constate la Sécurité sociale, le BTP reste l’un des secteurs les plus sinistrés, avec 56 accidents du travail enregistrés pour 1 000 salariés (la moyenne de tous les secteurs est autour de 34). Des manquements en matière de sécurité et de protection de la santé continuent d’être constatés sur les chantiers, pouvant mener à des accidents graves ». De plus, ces statistiques oublient les intérimaires, très nombreux dans le domaine, mais comptés à part : or, eux aussi on un taux d’accidents du travail extrêmement élevé.

Le BTP est donc un secteur dangereux, et ce n’est pas dû qu’à la nature du métier. Les organisations de travail sont aussi déterminantes, insiste Véronique Daubas-Letourneux. Enseignante chercheuse à l’École des hautes études en santé publique et sociologue (EHESP), elle a écrit Accidents du travail — Des morts et des blessés invisibles (Bayard, 2021). Entretien.

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Reporterre — Plusieurs accidents mortels survenus sur des chantiers du Grand Paris Express ont été médiatisés ces derniers temps. Qu’est-ce que cela vous inspire ?

Véronique Daubas-Letourneux — C’est avant tout dramatique, ce sont des personnes qui sont parties travailler et qui ne sont pas rentrées chez elles. La plupart des accidents du travail ne sont pas relayés dans la presse, ou alors les articles s’arrêtent à « Une enquête est en cours ». Cela contribuerait pourtant à rendre visible cette question. Lorsque cela survient, on est sous le choc, on manque d’analyse au long cours, car ce n’est pas encore considéré comme un problème de santé publique.

Les accidents du travail sont pourtant un fait social et poussent à s’interroger : doit-on s’habituer à vivre avec un niveau élevé d’accidents du travail ? Certes celui-ci est moins haut qu’il y a cinquante ans, mais il ne baisse plus. Et cela touche de manière plus importante certains…

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Auteur: Marie Astier Reporterre