Grenoble : les bibliothécaires en lutte contre le pass sanitaire

En France, le débat sur le pass sanitaire et désormais vaccinal, s’est essentiellement formulé, médiatiquement, à l’échelle individuelle : mon pass est-il compatible avecma liberté ? Ma santé vaut-elle la mise en place de dispositifs de contrôle extraordinaires ? Dans certains corps de métiers pourtant, d’autres questions ont émergé pratiquement et collectivement. Ce fût notamment le cas parmi les bibliothécaires de Grenoble : si les non-détenteurs de pass peuvent travailler et aller au supermarché, comment s’expliquer qu’on les empêche d’accéder aux livres ? Est-il acceptable pour une personne dont la vocation consiste habituellement à tout mettre en œuvre pour rendre la lecture accessible de se transformer en contrôleur de pass dont la fonction devient tout à coup d’en limiter l’accès ? Dans ce passionnant entretien, une bibliothécaire de Grenoble nous raconte 4 mois de lutte et de désobéissance contre un dispositif jugé aberrant, discriminatoire et éthiquement inconciliable avec son métier.

Les bibliothèques grenobloises viennent de connaître une lutte de quatre mois contre le contrôle du pass sanitaire. Pouvez-vous nous rappeler ce qui s’est passé ?Précédemment, durant les vagues successives de covid, les bibliothèques ont été considérées comme « essentielles » et n’ont jamais fermé, contrairement aux autres établissements culturels. Nous avons appliqué différents protocoles mais nous étions ouvertes. Le dernier en date était une une jauge limitée du public, et on pensait que ça resterait comme ça. Et puis ça nous est vraiment tombé dessus le jour où ils ont voté le décret, la jauge de fréquentation étant supprimée pour être remplacée par le contrôle du pass. C’est allé très vite, en plein été.Pour nous, c’était inenvisageable. D’abord parce que les bibliothèques sont des lieux où l’accueil se fait sans condition et sans discrimination. Ce sont des lieux ouverts à tous et on n’a jamais demandé un seul papier à quelqu’un pour qu’il puisse entrer en bibliothèque. Ensuite, on est vraiment un service de proximité, avec des usagers qui viennent quotidiennement. Tu vois des usagers chaque semaine depuis des années avec qui tu échanges, qui te parlent de leurs soucis de santé, tu vois les gamins grandir, etc., et du jour au lendemain tu devrais les contrôler et leur dire « toi tu rentres, toi tu rentres pas » ? C’est pas possible de casser ce lien avec le contrôle ! Et puis ça fait des années qu’on…

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Auteur: lundimatin