Hommage à Anne Sylvestre

Le 30 novembre 2020, la chanteuse poétesse, autrice-compositrice-interprète Anne Sylvestre disparaissait, laissant derrière elle un immense répertoire. Les grands médias ont sacrifié à l’exercice de la nécrologie élogieuse, saluant son engagement féministe et ses talents de chansonnière. Ce temps des convenances ne saurait pourtant faire oublier combien certains de ces médias l’ont marginalisée au fil du temps, et combien ses textes féministes, chantés pour celles qui n’avaient pas de voix, lui ont précisément valu d’être ostracisée par des directions éditoriales peu promptes à se faire l’écho de causes battantes, qui voguaient, à l’époque, à contre-courant.

Dans un entretien passionnant accordé à Cécile Prévost-Thomas et Hyacinthe Ravet pour la revue Travail, genre et société en 2010, Anne Sylvestre évoque ces questions parmi tant d’autres. En creux, on peut lire une critique joyeuse mais non moins acerbe des grands médias, et du conformisme (pour ne pas dire plus) présidant aux lois du dit « journalisme culturel » en général, traitant de la chanson en particulier. Avec leur accord, et nous les en remercions, nous en reproduisons ci-dessous deux extraits, en hommage à Anne Sylvestre.

« J’aurais bien voulu être censurée officiellement, mais même pas »

Après avoir évoqué ses débuts à la fin des années 1950, des débuts dans des cabarets sans micros, des débuts où « chanter ses propres chansons […] était déjà un acte féministe », Anne Sylvestre rouvre la page de ce qu’elle nomme « les années de brume ».

Anne Sylvestre : Il y a eu des moments compliqués, des moments où on a l’impression qu’on n’intéresse personne. Par exemple, ce moment où les médias m’ont laissé tomber, sauf les journaux ; la presse écrite m’a toujours été à peu près fidèle. C’était dans les années 1970, quand j’ai été étiquetée « la féministe de service ». Le principe était : « On n’écoute pas ce qu’elle dit mais on ne la passe pas ». Avant, je faisais des…

Auteur: Acrimed
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