En France, l’accessibilité aux soins et les difficultés qu’elle présente pour les citoyens sont tous les jours un peu plus au centre du débat public.
Les initiatives locales ou nationales destinées à l’améliorer sont nombreuses. Encore très récemment, une proposition de loi contre les déserts médicaux déposée à l’Assemblée nationale suggérait par exemple de contraindre l’installation des médecins dans des territoires sous dotés : cette dernière serait soumise, pour les médecins et les chirurgiens-dentistes, à une autorisation délivrée par les Agences régionales de santé (ARS).
L’accessibilité aux soins est, de manière générale, évaluée par l’adéquation spatiale entre l’offre et la demande de soins. Mais si, pour mesurer cette adéquation, l’offre de soins dans les territoires est relativement bien connue (notamment grâce à une bonne connaissance de la densité de médecins généralistes ou spécialistes et des temps d’accès des patients à ces praticiens), la demande de soins est souvent simplement estimée d’après le nombre potentiel de patients d’un territoire et leur âge.
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Or ces deux données préjugent assez peu de leurs besoins effectifs de soins ou de leurs contraintes de déplacement (logistiques, familiales, professionnelles…). Dès lors, dans des territoires qualifiés de « sous dotés », l’accès aux soins est très variable : il n’est pas systématiquement difficile… tout comme dans des territoires suffisamment dotés, il n’est pas automatiquement plus aisé.
Il convient donc de dépasser une lecture simplificatrice liant uniquement densité des ressources médicales et accessibilité.
Pour rendre compte des difficultés réelles d’accès aux soins, une lecture véritablement centrée sur le patient est préférable. C’est ce que permet l’étude du parcours de soins, qui renvoie aux soins (soins hospitaliers et de ville) et aux services de santé connexes (pharmacie, radiologie, laboratoire) nécessaires à la prise en charge d’une pathologie. Il a l’avantage de fournir une description détaillée des besoins en soins, de questionner leur articulation et d’inclure la dimension spatiale indissociable de la notion de parcours.
L’Accessibilité potentielle localisée (APL), un indicateur incontournable
Les principales mesures des difficultés d’accès aux soins utilisées en France reposent essentiellement sur des indicateurs de densité médicale et de temps d’accès au professionnel de santé le plus proche.
Ces mesures ont l’avantage de fournir une information synthétique et claire. Cependant, elle présente des limites importantes : les données de densité fournissent un chiffre global, pour le territoire dans son ensemble, mais elles ne restituent pas la variabilité de l’accès aux soins sur ce territoire. En effet, le fait qu’un patient se trouve à moins de 10 minutes d’un médecin généraliste ne préjuge pas de sa capacité et possibilité réelle à accéder à cette ressource médicale.
Pour dépasser ces limites, la DREES (Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques) et l’IRDES (Institut de recherche et documentation en économie de la santé) ont développé l’indicateur d’accessibilité aux soins : l’accessibilité potentielle localisée (APL).
Cet indicateur prend en considération la disponibilité des médecins généralistes libéraux sur un « bassin de vie », défini par l’Insee comme le plus petit territoire au sein duquel les habitants ont accès aux équipements et services les plus courants. La France métropolitaine est ainsi constituée de 2 739 bassins de vie comprenant chacun en moyenne 23 300 habitants.

L’APL intègre une estimation de l’activité des médecins ainsi que des besoins en matière de santé définis notamment en fonction de l’âge de la population locale. Il est donc plus précis que les indicateurs de densité médicale ou de temps d’accès au médecin le plus proche. L’APL est exprimée en nombre d’ETP (équivalents temps plein) de médecins présents sur un bassin de vie, et peut être convertie en un temps moyen d’accès à ces médecins…
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Auteur: Laurent Mériade, Professeur des Universités en sciences de gestion – Titulaire de la chaire de recherche "santé et territoires" – IAE, Université Clermont Auvergne (UCA)