Basta! : En avril 2020, vous lanciez une pétition, issue d’une tribune publiée dans Le Monde, demandant une revalorisation des emplois féminisés. Vous y écriviez notamment : « Depuis plusieurs années, des travailleuses en lutte, des syndicalistes, des chercheuses et des militantes féministes démontrent la vraie valeur de ces emplois et revendiquent le principe juridique “d’un salaire égal pour un travail de valeur égale”. Elles n’ont toujours pas été entendues. » L’avez-vous été depuis ?
Rachel Silvera économiste, co-directrice du réseau de recherche international et pluridisciplinaire « Marché du travail et de genre » et spécialiste des questions d’inégalités professionnelles.
Rachel Silvera : Non, hélas… Depuis cette pétition, il y a eu une grosse étude que j’ai pilotée pour l’Institut de recherches économiques et sociales (Ires) sur les métiers du soin et du lien aux autres. Celle-ci a fait l’objet d’un colloque et a été reprise dans certains médias. Mais à ma connaissance, elle n’a pas eu d’échos au gouvernement.
Là où il y a néanmoins eu un vrai relais, c’est au sein des organisations syndicales et féministes. Parmi les revendications autour du 8 mars, la revalorisation des métiers féminisés est désormais en bonne position et fait l’unanimité. Mais concrètement, rien n’a été fait. Rien de rien. Le principe d’un salaire égal pour un travail de valeur égale n’est toujours pas appliqué.
Il y a un véritable verrouillage du patronat, qui fait un lobbying extraordinaire là-dessus. J’ai commencé à travailler sur ce sujet dans les années 1980. J’ai essayé de faire des choses, de mobiliser sur ce thème… Eh bien à chaque fois, j’ai eu des bâtons dans les roues. Le Medef a muselé le gouvernement et l’a empêché d’agir.
Avec ma collègue Séverine Lemière, on a lancé une opération avec le Défenseur des droits,…
Auteur: Rozenn Le Carboulec