Impunité des multinationales : Total devant la justice

A l’ouest de l’Ouganda, dans la région du lac Albert, Total s’apprête à forer plus de 400 puits pour y extraire du pétrole. Un tiers d’entre eux sont situés dans une zone naturelle protégée. Frontière naturelle avec la République démocratique du Congo, cette région échappait encore (relativement) à la spéculation foncière à laquelle le pays fait face depuis deux décennies, résultat des politiques libérales mises en place par son président autoritaire Yoweri Museveni, qui conserve le pouvoir depuis un coup d’État en 1986.

Découvert en 2008 dans le royaume traditionnel du Bunyoro (en Ouganda) ; le gisement du lac Albert avait rapidement été partagé entre plusieurs géants pétroliers. Quelques années plus tard, Total est devenu opérateur du projet en acquérant un tiers du gisement auprès de la compagnie britannique Tullow Oil pour la modique somme de 1,5 milliard d’euros, puis la totalité des parts de cette compagnie en 2020.

Aujourd’hui, l’heure est à l’accélération du mégaprojet d’extraction avec oléoduc avant que les États ne finissent par réellement interdire les nouveaux projets pétroliers, comme le recommande le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) pour respecter notamment les termes de l’accord de Paris et limiter le réchauffement climatique à 1,5 degré.

TotalEnergies, le nouveau nom de la compagnie pétrolière, symbole de sa stratégie de greenwashing, fait ainsi en février 2022 une annonce majeure : un investissement de 10 milliards de dollars avec l’Ouganda, la Tanzanie et sa partenaire la China National Offshore Oil Corporation (CNOOC), pour l’exploitation pétrolière du gisement ougandais (les projets Tilenga et Kingfisher) et la construction d’un oléoduc (EACOP) de « 1 443 km entre la ville de Kabaale en Ouganda et le port de Tanga en Tanzanie ».

Il est prévu que la production démarre en 2025 pour 20 à 30 ans. Le pétrole extrait – jusqu’à 230 000 barils par jour – sera destiné à l’export et chauffé à 50 degrés tout le long de son transport sur le continent via EACOP.

Sur son passage, l’infrastructure géante menace des milliers de kilomètres carrés d’écosystèmes fragiles et de terres agricoles vivrières. 118 000 personnes sont actuellement en train d’être expropriées entièrement ou partiellement. Plus de la moitié d’entre elles attendent encore de recevoir leur compensation (depuis trois ou quatre ans pour certaines) alors même qu’elles sont déjà privées de la libre utilisation de…

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Auteur: Juliette Renaud, Marie Beyer, Mathilde Manteaux